dimanche 10 avril 2011

L'affranchi !

- J.1 -

J'ouvre l'œil, apparemment, je suis pas mort, enfin, si je l'étais, j'aurais pas aussi mal au crâne je pense. je tente un rapide coup d'œil autour de moi ... Le constat est clair : Ils nous ont pas loupés. Jenny, ma copilote, est empalée sur une branche énorme. Moi, j'ai rien, un miracle, un putain de miracle, si y'a un type en haut, il doit m'avoir drôlement à la bonne. J'éclate de rire, je sais pas pourquoi, ça doit être nerveux, je sais pas si c'est parce que je sais que je suis bloqué comme un con sur un caillou verdoyant à 50 milliards de kilomètres de la civilisation, ou si c'est pas que j'ai survécu, un peu des deux, sans doute...

Ça doit maintenant faire 20 minutes que je suis là, et je tente " Y'a quelqu'un ? ". Stupide, si y'avait des survivants, ils m'auraient déjà entendu rire, et ils auraient sûrement pris la fuite ...
Je décroche mes ceintures, et je trébuche contre le cadavre de ma voisine. Pas mal foutue la gamine ... Dommage, je suis pas nécrophile.

Quand je pense qu'elle était arrivée 2 semaines plus tôt sur Pandora...

Je prends l'exopack qui, du coup, ne lui sera plus d'une grande aide et tente ma chance jusqu'à l'arrière. Mauvaise pioche, pas de survivants, en fait, même pas de cadavres, juste une trainée sanguinolente, et des tripes qui pendouillent mollement à un reste de rotor, ballotées par le vent. Dois-je rire ou dégueuler ?

Bon, après m'être lâché un bon coup, je fouille la cale en quête de quoi que ce soit qui puisse être utile, de la bouffe, une trousse de secours, une arme, n'importe quoi ! ...
Un revolver, deux rations de survie et un purificateur d'eau. C'est officiel, j'ai une putain de chance...

Enfin, tout est relatif.

Autant rester ici jusqu'au lendemain, il fait déjà sombre, et puis bon, qui sait ce qui rôde en bas la nuit, j'ai envie de rigoler en pensant aux pauvres fantassins qui auraient réchappé au massacre d'aujourd'hui ...
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-J.2-

8h28 à ma montre, heure terrienne, celle de New York pour être exacte ... Ici, je sais pas quelle heure il fait, mais il fait jour, c'est le principal. Je suis descendu de mon refuge en utilisant la corde qui en temps normal aurait servi à un largage rapide des troupes sur le terrain, mais ça, c'est bien le dernier truc dont je me soucie, y'a un truc qui se balade dans le coin : Un truc gros. J'ai été réveillé par des coups de feu, et surtout par un rugissement, suivi d'un râle d'agonie ... On aurait pu réver mieux pour une sortie. En attendant, j'ai quand même récupéré une armure à peu près en état sur l'un des cadavres en bas de l'hélicoptère, son fusil aussi, ça peut toujours être utile. Je part braver l'inconnu le sourire au lèvres et les poches pleines de cartouches...

Je marchais, je marche, et j'ai l'impression que j'ai perdu toute notion du temps. Le soleil est au zénith, j'ai donc perdu toute notion du temps, ça joue pas vraiment en ma faveur, si je continue comme ça, une des saloperies qui gambade dans cette jungle me bouffera, et j'en aurai même pas conscience. Rigolo ? Flippant ? Moi, en tout cas ça me donne faim ...

Après une petite pause déjeuner à base de restes de rations, je me remets en route. Plus j'avance, plus j'ai envie de me tirer une balle, pas un seul survivant, des cadavres éparpillés un peu partout, que ça soit des bleus, des bêtes ou des humains, on en trouve à intervalles réguliers, la plupart du temps sauvagement déchiquetés pour les humains, et découpés, net et sans bavure à l'arme lourde, pour la faune locale. A chaque fois que je me crois sûr de retrouver un type encore en vie, par un trainée de sang filant vers les buissons, ou en suivant les douilles démesurées des AMPs, c'est pour me dire au final qu'un seul truc :

Je suis seul au monde ...

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-J.3-

J'ai mal dormi ... Mais ai-je seulement dormi ? Était-ce un rêve ?

J'ai grimpé dans un arbre, assiégé par des saloperies, sûrement attirées par le feu que j'ai fait pour faire cuire les .... "végétaux" que j'ai récolté en fin d'après-midi. Au début ils ont tentés de grimper, j'en ai plombé 2 ou 3, peut-être plus, et ils ont commencés à tourner autour du tronc, je me suis forcé à rester éveiller, mais j'ai bien dû m'endormir.
Un truc me fait douter : Il n'y a plus de cadavres, y'en a peut-être même jamais eu. Il n'y même plus de trace du feu. J'ai eu une hallu ? ...
Faut que j'arrête de penser à ça ... Penser à un truc positif ...
Jenny ? Non, c'est malsain ... Et pis je vais avoir des remords.

Non, finalement, mieux vaut éviter de penser, je crois qu'en soi, c'est déjà malsain. Je continue d'avancer, tout droit, à travers la jungle. Ne penser qu'au chemin, tout droit ...

"Krrrrrrrr..."

Et merde, c'est quoi ce bruit ? ...
Non, en fait, je me hais, j'aurais dû rester à crever la gueule ouverte dans mon hélico, ou sur mon arbre, à les laisser me bouffer, ou même à enlever mon 'pack...

"Krrrrrrrr..."

Non, en fait, c'est rapé ... Et je crois que ça se rapproche.
Je reste en place, j'attends la mort, serein.
C'est la meilleure chose à faire ...

"- Ta-an ... Ta-an rout-é !... Rout-é, naoun palouloukan ... Rout-é !"

Y'a quelqu'un avec ?! Un type qui a besoin d'aide apparemment ... Ca change tout !

Je m'élance à travers les broussailles, glisse entre les racines d'un arbre énorme. Ca y est, c'est l'heure de vérité, je suis pile dans le dos du la bête, je m'y attendais, c'est du gros, du mastodonte même, on dirais la maman des trucs qui m'ont attaqués cette nuit, de derrière en tout cas.
Elle m'a vu, elle se retourne face à moi, et me gueule à la figure ...

" KRRRRRRRRRRAAAA !
- Ah oui, t'as pas une tronche de top-model toi ..."

Oh la boulette ! C'est parti tout seul, plus fort que moi, je lui ai balancé ça en plein dans les yeux, sans sourciller. Elle a pas l'air contente du tout que son dîner se foute de sa gueule.

Une tension soudaine de ses muscles m'indique que ce truc va me sauter dessus, tout semble aller au ralenti. Je me jette sur le coté en défouraillant au hasard.

Ca n'a fait que l'énerver, touché ou pas, j'ai l'impression de tirer avec un lance-pierre sur un blindé.
Il ouvre à nouveau la gueule, une chance pareille ne se représentera pas.
J'ajuste l'arme, tout semble aller de plus en plus lentement, mon coeur bat comme un fou-furieux, sa cadence remonte à mes oreilles, comme autant de coups de tambours. Une putain de chance, ou une putain de fin à la con, tout ça pour sauver un inconnu ...

" KRRRRRRRRAAA
*Bratatatatatatatatatata...*
AAAAaaaaaa.... "

Ca y est. C'est fini, enfin je crois. J'ai mis la dose. Je m'avance pour constater...

Je l'ai pas loupé, y'a de la bidoche partout, apparemment des balles ont ricoché contre sa boite crânienne et sont ressorties par les yeux, le cerveau coule par tout les orifices disponibles. Dégueulasse.
J'ai vomi par-dessus mon œuvre, ironique, c'est encore pire ...
Deuxième salve. Putain, c'est douloureux ! Y me reste que de la bile, j'ai du mal à respirer, j'vais tomber dans les pommes...

Pandora ne m'aura au moins pas eu aujourd'hui...
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- J.? -

Tiens, j'ouvre les yeux sur un endroit étrangement familier...

" - T'ouvres enfin les yeux ? Tu reviens de loin mon gars ! "

Je tourne la tête vers la source, un bleu. Putain de merde, j'suis foutu, c'était prévisible, et plus d'arme pour me défendre...

" - Me butez pas merde, j'lui veut rien à votre planète, c'était les ordres du Colonel !
- Ah ah ! Tu risques rien mon gars, c'est mon avatar que tu vois là. J'suis le docteur Sidorovitch. T'es à l'Enfer, y'a plus aucun na'vi en liberté dans l'enceinte, garanti ! T'as du pot qu'on t'ai retrouvé. Apparemment y'en avait un sur toi, un sadique, il gueulait à la mort et cherchait à te buter à en croire les gars qui t'ont retrouvé : t'avait plus de masque.
- Sérieusement ? J'ai explosé la caboche d'une bestiole qui faisait 2 fois ma taille pour sauver un bleu ?
- Faut croire ... Et t'es pas tombé sur le plus stable mentalement ! Ah au fait, beau travail pour le Thana...
- ... Et il est devenu quoi ?
- De quoi, le na'vi ? Ils l'ont emmené et foutu en cellule ici, ils allaient pas le buter, c'était un gosse. Il refuse de parler, en fait, on sait même pas si il comprends notre langue. Je me demande ce qu'il foutait tout seul dans la forêt, mais j'ai trop de boulot ici pour aller le voir."

Un gosse qui chialait sur mon corps hein ? J'espère qu'il ne va pas me prendre pour son sauveur, ou une connerie du genre ...

"- Bon, maintenant que t'es réveillé, je pense que tu va pouvoir libérer la place, désolé d'être aussi brusque, mais les hélicos reviennent des recherches avec toujours plus de blessés à soigner, je sais pas si t'as remarqué, si j'ai besoin de mon avatar pour opérer ici, c'est parce qu'on est dans un dortoir qui a des entrées d'air, on utilise déjà toutes de la base avec des purificateurs d'air ... Et puis bon, ça fait quand même 3 semaines que tu squattes ce pieu sans bouger et qu'on t'injecte de la compote par intraveineuse ! Ahahahah !"

Putain, trois semaines sur un lit d'hôpital, dieu sait ce qui a dû se passer pendant ce laps de temps...
Le doc m'aide à me relever, je titube avant de reprendre plus ou moins conscience de mes mouvements, et c'est là que je commence à découvrir l'ampleur du désastre :
La salle dans laquelle les vitres ont été sommairement rafistolées avec des plaques de métal et il y a des types allongés partout où il y a de la place. Je me fraie un chemin jusqu'au sas, qui sert maintenant surtout à la décoration, à l'intérieur, une musique d'ascenseur, et sur la porte, une affichette, "INFIRMERIE - SALLE 7" suivi de l'inscription " Interdiction de fumer dans le sas ! "

Je pousse la porte, et me retrouve en plein jour sur ce qui est ( ou fût ?... ) Hell's Gate. La zone est méconnaissable, comme si une bataille avait eu lieu ici. Sur le tarmac, il y a une navette qui semble avoir connu des jours meilleurs, intégralement peinte en rouge avec des lignes or et le cockpit bleu, on peut lire sur son flanc, par-dessus la représentation d'une créature ailée locale " Air Pandora " et, peint à la va-vite en dessous " From Polyphemus with love ". Autour d'elle s'affairent quelques camions-bennes, reconvertis en gigantesques camions citernes, et quelques dizaines de bonhommes occupés à brancher des tuyaux entre la soute de la navette et les citernes. Plus loin sur la droite, vers les vestiges de bâtiments administratifs, il y a d'énormes feux de camps sur lesquels grillent des Titanosaures ( Faudra que je me documente plus sur le faune de cette foutu planète d'ailleurs, ça m'évitera de faire des conneries avec toutes les saloperies qui me voudraient comme casse-croûte ) et des bêtes plus petites, enfin, des congénères de la saloperie que j'ai descendu.

Je fais à peine quelques mètres pour continuer mon exploration, qu'une voix m'interpelle :

" - Ah ! Enfin un type qui sort en vie de cette morgue ! T'as du pot d'avoir survécu, Sidorovitch est meilleur cuisinier que chirurgien !
- Ouais, ben tu s'ra bien content de l'avoir quand les tarés qui sont censés nous couvrir avec leurs hélicos te charcuteront par inadvertance ..."

J'y crois pas, les deux types qui sont censés monter la garde devant l'infirmerie étaient en train de jouer aux cartes, et maintenant ils s'engueulent comme des gamins. Le plus fort, c'est qu'ils tiennent plus du guérilleros que du soldat, celui qui m'a interpellé a un fusil bricolé avec une lampe torche scotchée dessus, des ceintures de grenades sur le torse par dessus une chemise hawaïenne délavée aux manches coupées. Il a un masque respiratoire de mineur auquel s'adjoint des lunettes de soudure, ce qui m'empêche de voir sa tronche...
Son pote, c'est encore pire. Il a un arc en bandoulière et il est torse nu sous son gilet pare-balle.
J'ai l'impression d'être tombé sur un camp de vacances plutôt que sur une base militaire.
Monsieur l'archer a vraiment l'air passionné par son sujet.

" - ... ueule ! J'te dis que les Faucons sont des barges ! Ils m'avaient réquisitionné à la porte quand ils sont allés chassés des léo' pour le fun la semaine dernière, pour le FUN ! Putain, tu réalises ? Virus a même failli exploser son Samson juste pour que Lev en abatte un à l'arbalète !
- Sérieux, il a vraiment fait ça ?
- Ouais ! Et Lev a failli y laisser un bras !"

Bon, c'est pas tout, mais j'aimerais bien savoir où aller moi ...

" - Pardon de vous déranger dans vos débats sûrement très intéressants d'un point de vue philosophique, mais vous sauriez pas où je peux trouver quelqu'un qui pourrait me renseigner sur le délire à ciel ouvert qu'est devenu cette base ? "

Apparemment, ils m'avaient complètement oubliés, le surfeur masqué se tourne vers moi avec un air dans les yeux qui me donne l'impression d'être un zombie, ou un truc vraiment très déplaisant à voir...

"- Ah merde, désolé ... Heu, va voir Ari au QG, tu peux pas la louper, elle a son bureau dans les hangars, c'est elle qui s'occupe des nouveaux et du matériel ... enfin à ce que j'ai compris ...
- Ok, merci ..."

J'suis pas rendu, je sais vraiment pas ce qui s'est passé ici. Peut-être que cette "Ari" pourra me renseigner.
J'engage le pas vers les hangars, mais à peine à l'angle du dortoir, je suis encore surpris. Ce coin regorge de surprises, vraiment. Il a dû se passer un truc louche pour que des humains soient obligés d'utiliser des arcs, ou des arbalètes à ce que j'ai entendu, et que surtout, pour que devant mes yeux ébahis, des types en AMPs s'entrainent avec des épées, des boucliers, des haches et encore tout plein d'armes archaïques, faites avec des pièces apparemment tirées de carcasses de véhicules et assemblées avec des cordes sur des manches de bois ou d'os. J'aurais jamais cru voir ça de ma vie.
A peine ai-je fini d'admirer le spectacle que passe au dessus de ma tête deux Scorpions qui filent se poser près des hangars. Je croyais avoir tout vu en matière de personnalisation délirante avec la navette : Je me trompais.
Les deux appareils déjà lourdement armés ont reçus en plus d'autres mitrailleuses au bout des ailes d'emport, trois racks de roquettes et une tripotée de missiles de plus par-dessus, maintenus en place par des câbles en métal et de la soudure, agencés de tels manière que ça ne gène pas les mouvements des rotors. Toutefois, ce qui m'attire l'œil encore plus, c'est leur peinture. L'un est intégralement noir avec des formes géométriques vertes parcourant l'intégralité de l'appareil, tandis que l'autre est entièrement recouverts de motifs de flammes...

Non, sérieusement, je commence à me demander ce qu'il se passe ici, il n'y a plus aucune autorité supérieure ? C'est l'anarchie totale ou quoi ?

Je presse le pas jusqu'au hangar, à l'entrée, un panneau : " ^ EARTH : 31 billion Miles |< HUMAN/PANDORA BORDERS ( BEWARE THE MINEFIELD ! ) : 1.3 Mile | ARI'S OFFICE > |"

Je suis la flèche qui indique l'escalier et arrive devant un sas. J'entre. Celui-là fonctionne, bonne nouvelle. J'ôte mon masque et je rentre dans les locaux, un long couloir se déroule devant moi, une pancarte griffonnée m'indique la direction du bureau de l'Ari en question. Un type en exosquelette me fait entrer après m'avoir fouillé et je me retrouve dans un bureau richement décoré, enfin, selon les critères pandoriens ... Des armes na'vi en vitrine ainsi que diverses tapisseries de même origine, des plans détaillés de la base et quelques écrans répartis un peu partout, ah, et il y a aussi un tapis de minigolf et un club au fond de la pièce, devant cet attirail, un bureau en métal, dessus, une collection de tasses à l'effigie de drapeaux de divers pays, une lampe, des pots à crayons, un revolver, des dossiers, un couteau et un ordinateur. Derrière lui, une fille d'une vingtaine d'années à peine, je m'attendais à quelque chose de ... différent pour une intendante, mais on ne va pas se plaindre. Ari est à première vue une asiatique avec des cheveux bruns détachés descendant jusqu'au cou et un des plus jolis minois qu'il m'ait été donné de voir depuis que je suis sur Pandora.
Elle porte un treillis impeccablement repassé et une casquette d'officier ainsi qu...

" - Bon, quand t'aura fini de te rincer l'œil, tu viendras t'asseoir, si ça te déranges pas ? "

Et merde, chassez le naturel, il revient au galop ...

" - Heu, oui m'dame
- C'est déjà mieux. Bon, tu dois être celui que m'envoies Sidorovitch. T'as beaucoup de chance d'être sorti de son infirmerie, il est docteur en biologie, mais il est pas foutu de faire une piqûre correctement...
- J'avais cru comprendre que c'était pas le meilleur toubib sur la base en effet.
- Bref, c'est quoi ton nom, ou ton surnom, et qu'est ce que tu faisais avant de débarquer ici ?
- Heu, J'pilotais un Samson et j'm...
- Super ... Bon, demain je te présente aux Faucons, avec un peu de chance, t'aura ton hélico à toi. Bon, tu peux disposer.
- Heu, j'ai une question ..."

Elle soupire, c'est marrant, mais j'ai l'impression qu'elle sait déjà ce que je vais demander.

"- Vas-y toujours ... J'imagine que tu te demandes où est-ce que tu as atterri ... Et bien je vais te répondre : Dans la merde la plus noire de ce coté de l'Univers. Les autorités de la RDA se sont cassés en nous laissant en plan derrière, il ont au moins eu la gentillesse de laisser leur matériel...
Moi comme la moitié des personnes encore vivantes sur cette base, on vient des mines d'unobtanium et des avant-postes les plus reculés. Les autres, c'est pour la plupart des survivants de la bataille, ou des gars d'avants-postes un peu plus proches qui ont été assiégés par les bleus avant qu'on intercepte leurs messages de détresse et qu'on vienne les chercher. Actuellement, on n'a plus aucun moyen de communiquer avec la Terre, on a encore accès au réseau de satellites, donc on peut encore globalement localiser les poches de survivants, mais on ne sait plus pour combien de temps, tout tombe en ruines ici...
Tu as aussi sûrement dû le remarquer, mais comme il n'y a plus d'ordre clairement défini, c'est devenu le bordel. Les gars se sont organisés en clans, regroupés par secteur d'activités en général, les Faucons par exemple, c'est le clan des pilotes d'hélicos, et les Anges de l'Apocalypse, que tu devrais aussi beaucoup voir si tu rejoints les Faucons, sont ce qu'on pourrait appeler des parachutistes. On a bien un "chef" pour réguler les ardeurs et les conflits entre tout ce beau monde, mais rien qu'en 3 semaines, je sais déjà que ça va exploser si toute cette foutue base n'a pas un objectif commun, la survie, c'est très relatif comme notion...
- Ah oui, c'est quand même chaud comme situation ... Et c'est quoi ces délires avec les AMPs qui utilisent des épées, les types avec des arcs ou les hélicos customisés ?
- Ben, ça c'est les conséquences du départ de la RDA, on a remis en route l'usine qui sert à fabriquer du matériel et des munitions, mais elle tourne à plein régime vingt-quatre heure sur vingt-quatre, ou quelque-soit la durée d'un jour sur ce caillou, pour fabriquer ce qui nous sert à retaper cette base. Du coup, comme la plupart des AMPs dont on dispose sont issus des mines et qu'ils n'étaient pas armés, on improvise, pareil pour les arcs, les fusils se font rare.
Les hélicos bricolés par contre, ils appartiennent presque tous aux Faucons, ils se sont un peu lâchés sur la déco, je l'avoue, et se sont les seuls qui ne subissent pas trop la "crise" du matériel, on a récupérés tellement de missiles sur les carcasses d'hélicos qu'ils ont assez de munitions pour tenir encore quelques mois en tirant comme ils le font, et ils en ramènent toujours plus, au point que je les soupçonne de garder même du matos dont ils n'ont pas besoin et qu'ils ne m'ont pas déclarés ...
- Et y'a pas moyen de rétablir un semblant d'ordre ?
- Si j'étais à la tête de cette maison de fou, j'essaierais bien, mais je suis que l'intendante, et cela juste parce que l'obsédé qui est à la tête de l'"Autorité" a flashé sur moi, comme la moitié des "haut-gradés"...
Non, franchement, si je le pouvais, je me barrerais bien et j'irais vivre dans les bois avec les na'vis, mais pas avant d'avoir essayé de voir si y'a rien à tirer des empotés et des pervers du secteur...
Tu sais quoi ? Faut qu'on reste en contact, j'aurais bien besoin d'un type qui, comme moi, ne voit pas d'un bon œil le foyer anarchiste qui repose ici ... Et j'imagine que c'est ton cas.
- Heu ... Merci
- Bon, maintenant, j'imagine que t'es crevé, et même si tu ne l'es pas, tu es prié de décamper, je dois aller faire mon compte-rendu de la journée au chef, qui va encore tenter de me foutre dans son pieu...
Ah, et vire tes yeux de ma poitrine, j'ai vraiment pas envie d'avoir à te truffer la cervelle pour insubordination... "

Et merde ...
Bon, je tourne les talons, et SURTOUT, je ne me retourne pas, elle serait bien capable de le faire !
Bon alors maintenant, mon objectif principal, c'est de trouver un lit...

Mais putain, je comprends pourquoi elle se fait draguer par tout les lourds du coin !

Tiens, j'entends le "clic" typique du retrait de la sécurité d'un flingue...

" - Bon, t'arrêtes de me mater ou tu cherches vraiment à se que j'accroche ton crâne à l'entrée de mon bureau en avertissement à tous les obsédés qui passerait dans ce couloir ? "

Désolé, miss, plus fort que moi ...

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-J.25-

J'ai dormi comme un bébé, ça doit être la première fois que ça m'arrive depuis ... Ah ben merde, 3 jours dans la cambrousse, 3 semaines dans les vapes, et pouf, vous avez l'impression de ne jamais avoir vu un lit de votre vie...

J'ai tant bien que mal trouvé la cafétéria, qui est devenue ... space. La bouffe est bien meilleure ( Très bon gout le titanosaure d'ailleurs, un bon steak le matin, ça fait toujours plaisir ... ), mais l'ambiance. C'est étrangement ( ou évidemment... ) l'endroit où l'on ressent le plus que cette base est divisé, Ari m'a rapidement introduit à la table des fameux "Faucons", de vrais barges, les gardes de l'infirmerie ne s'y trompaient pas. On a rapidement fait les présentations, parmi ceux que j'ai retenu, il y a Hadès, celui à qui appartient le Scorpion en flamme ( baptisé le plus sobrement du monde " Hellfire " ). Ce type est un gringalet qui passe son temps à picoler et à roter sans jamais quitter son casque, peint à l'effigie de son élément favori. Il a hérité de son surnom parce qu'il est pyromane, et que son Scorpion n'embarque quasiment que des armes incendiaires. Il y a aussi Booster, un des nombreux mécanos du clan, et surtout le principal et le seul à grailler à la table des pilotes, en même temps qu'eux. Il passe son temps sur son "bébé", un Dragon en pièces détachées dont il a trouvé les pièces dans la baie de stockage du matériel, et maintenant il prie pour que le prochain vaisseau de la Corp' qui passe dans le coin apporte le système électronique. Le dernier gars dont le nom me revient s'appelle "Shogun" et c'est le chef du clan, ainsi qu'un des seuls qui ne passe pas son temps à picoler ou à se shooter. C'est un noir élancé avec un visage taillé à la serpe qui se balade avec un uniforme de pilote couvert d'idéogrammes et de têtes de dragons ou de "léonoptéryx", le ptérodactyle du coin qui, à l'en croire, possède une chair succulente.
C'est grâce à lui que je tiens la plupart des informations que je sait sur la base : Quasiment tout le monde sur la base n'a plus de nom, mais un pseudonyme, pour oublier son "ancienne vie", puisque de toutes façons, on est condamnés à rester sur ce caillou. Ca évite les coup de blues et le mal du pays. Le mien, c'est " Turok ", accordé par les deux gars qui m'ont récupérés ( et qui étaient tout deux du clan. Putain, je me demande même si ils en ont pas profités pour me sauter pendant le retour, je les en croiraient bien capables... ), parce que j'ai buté un " Thanator ", le gros toutou avec sa tronche de top-model...
Ah, et Ari s'en doutait, mais c'est sûr, ils gardent du matos en douce, mais Shogun s'est dédouané en disant que tout le monde faisait ça...
C'est donc le bordel le plus complet, et personne ne s'en cache. La philosophie de Shogun à propos de ça : " On s'en fout, on va tous crever, alors autant se lâcher... "

Mais actuellement, je me pose d'autres questions. Ils m'ont enrôlés en tant que copilote sur un Samson. Les gars sont heureux comme pas deux : On va faire une sortie. Le haut-commandement nous demande de faire un carton sur les bleus qui prennent en embuscade les gars qui cueuille de la bouffe derrière le champ de mine de l'entrée, je suis sûr qu'ils sont jaloux du fait qu'elles soient à reconnaissance ADN : Des p'tits bijoux de technologies en y pensant, y'a que les trucs possédant de l'ADN humain qui peuvent passer dessus sans terminer en steak haché...

On embarque joyeusement, moi dans un Samson presque aussi armé qu'une Scorpion et recouvert de peintures de crânes, de têtes de zombies, ou, plus original, de casques blanc tirés d'un vieux film de SF qui a eu son heure de gloire au 20ème siècle si je me rappelle bien, un truc avec "Star" dans le titre...
'Fin bref, le pilote s'appelle Overseer et a l'air joyeux d'avoir un peu de compagnie. On embarque une quinzaine de gars à l'arrière, tous avec une blinde d'explosifs sur eux, des armures en métal de récupération pour certains, torse nus sous leurs ceintures d'explosifs pour tout le reste. Ils sont armés d'épées, de boucliers en bois ou en métal de récup', de sabres, de haches, voire de pieds de biches ou de massues de fortunes, mais ils ont l'air unanimement contents avec leurs peintures de guerres, certains rient mêmes comme des fous-furieux. Je crains le pire, chaque minute qui passe me fait flipper plus que la précédente. J'vais pas tarder à péter un cable ...
" Des Ronins " me signale le pilote,
" Les bleus pourraient massacrer ces félés sans trop se fouler, mais ils se pissent dessus en les entendant arriver en gueulant. Ils ont une fâcheuse tendance à se faire sauter dans la mélée. Ils n'en peuvent plus d'être ici, alors ils se rendent utiles à leur façon ... "

Ca y est, le signal est donné, on décolle. Une belle formation, on est une vingtaine d'appareils bricolés de toutes les couleurs, on est la mort venu du ciel, une mort ridicule qui semble plus tirée d'un carnaval post-apocalyptique que d'une armée, mais une mort qui est bien réelle...

Vu du ciel, Hell's Gate est une mer de bâtiments en ruines plus ou moins retapés, de feu de camps et de terrains d'entrainements, une vrai fourmilière ! Des AMPs, des camions, des Cygnes, des buggys, tout s'affaire en bas...
Nous, on se dirige droit vers la porte Nord, la seule qui soit encore fonctionnelle, à ce que j'ai compris. Les réactions à notre passage sont très mitigés, certains nous acclament, d'autres nous font des bras d'honneur...
Sur le rempart, des tourelles automatiques, des AMPs et des patrouilles de gars apparemment euphoriques, eux, de voir venir la relève. La barrière de béton franchie, je découvre le massacre, en contrebas, des dizaines de carcasses de bêtes de toutes tailles, de véhicules, des cadavres d'humains et de bleus, et des cratères assez énormes.
On file vers la forêt, déjà les flèches pleuvent dans notre direction. Les Scorpions brisent la formation, et commencent immédiatement à bombarder la forêt. Overseer rigole, c'est vrai que c'est assez comique de voir des bleus sortir de la forêt qui s'embrase pour courir dans le champ de mines et les voir s'envoler à quelques mètres de hauteur dans une gerbe de sang, de terre et de feu.

Enfin, c'est comique si on est amateur de gags bien gras et bien dégueulasses, si on est humain quoi.

On ne prend pas de risques, on déploie les cordes et les Ronins descendent en rappel, avec ce champ de mines, ce serait un coup non seulement se faire péter, mais aussi à passer pour des cons pour les témoins, bonjour la renommée posthume...
Les fantassins se ruent dans les bois en flammes en gueulant comme des damnés, déjà on peut entendre des explosions, je comprends les bleus, j'aimerais pas avoir des barges comme ça face à moi.

On commence nous aussi à bombarder la zone. Les bleus pullulent un peu partout, je me demande si ils sont courageux à un point qu'on ne peut pas imaginer, ou si ils sont tout simplement cons.
Overseer me désigne du doigt un écran d'ordinateur près de mon siège. Je regarde de plus près ...

" Tiens, regarde un peu ce qu'on a récupéré en allant te chercher dans la jungle, y'a pas de raisons que tu t'amuses pas non plus ! "

C'est une tourelle gatling à contrôle manuel depuis la cabine ! Top délire comme jouet ! Je commence à tâter la bête ... qui crache ses cartouches à une cadence hallucinante...

J'adore cet engin ! Je viens de découper un bleu un peu trop imprudent en deux, et je rigole comme un gamin, en entrainant Overseer. Finalement, y'a pas que des trucs à jeter avec cette nouvelle organisation de la vie pour les survivants !

" - Bon les mecs, c'est bon ! On a fait le ménage, vous pouvez descendre nous repérer... Ah, et allez-y mollo avec la gâchette, on a des ... heu ... "prisonniers", enfin, on a des bleus pour les gars du labo quoi ...
- Oh putain, on doit déjà rentrer ?
- Bah faut croire, et te plains pas, vu comment tu vises, t'allais finir par nous découper sans t'en rendre compte, tu devrais calmer sur la picole ! ... "

J'y crois pas, quel connard !
Overseer me fait signe de me calmer ...

" - T'inquiètes, celui-là, on te le récupère à l'arrivée à la base. Si y'a bien un truc qu'on déteste dans le clan, c'est les petits merdeux comme lui... "

Sur cette déclaration, il se pose, et 5 types en armure avec des armes qui font deux fois leurs tailles embarquent, suivis rapidement par 2 bleus menottés, un gars et une fille, vêtus de pagne, typique des sauvages quoi. Ils ont l'air extrémement sereins, à la limite du flippant même, je détourne mon regard avant d'accuser un sentiment de culpabilité, et immédiatement on décolle ...

En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, on a regagné le tarmac. La "bataille" a duré à peine 20 minutes et aucune perte n'est à déplorer parmi les hélicos, pour les Ronins par contre, ils sont moins de la moitié de ce qui étaient partis au départ, mais ça ne les choquent pas plus que ça...
A peine descendu de l'hélico, Booster arrive pour me demander mes impressions sur la gatling, avant de rapidement se diriger vers l'hélico d'Hadès pour l'engueuler sur les rayures de la peinture. Je vois un groupe de types en exosquelettes avec des fusils se diriger vers les autochtones pour les escorter jusqu'à leur lieu de rétention, enfin je présume. En tout cas, les nouvelles vont vite.
Shogun me libère après m'avoir félicité pour le carton que j'ai fait, je suis donc apparemment accepté dans le clan, c'est plutôt cool.

En attendant, je profite de ma permission qui m'est accordée pour aller explorer la base ... Enfin, je pensais le faire, quand un Cygne s'est dirigé vers moi pour me barrer la route. Le pilote descends et me demande de monter.

" - C'est toi Turok ? On m'a dit que t'es le gars qui a sauvé le gosse na'vi.
- Ben ouais ... Pourquoi ?
- Il demande à te voir, me demande pas pourquoi, mais comme Ari pense que tu pourra le faire parler, elle te demande d'aller lui causer.
Ah, elle a aussi dit que c'était un ordre..."

Putain, fantastique ... J'ai pas vraiment le choix, donc j'embarque dans la bagnole, qui est peinte en rouge avec un missile gris à trainée verte peint sur le coté et des sièges en cuir de ... Je sais pas trop quoi et je demande pas à savoir, mais c'est confortable ... Que demande le peuple ?

On roule relativement vite vers le complexe principal, en chemin, on croise le parking d'un des multiples clans de fous du volant du secteur, au milieu des buggys et des Cygnes tous plus colorés et/ou recouverts de plaques de métal les uns des autres, on peut voir ce qui ressemble de loin à des véhicules chenillés assez énormes autour desquels s'affairent des mécanos.

" La RDA n'avait pas le droit à des chars, mais bizzarement ils avaient quand même les plans d'assemblages dans les usines, sûrement un cadeau du gouvernement en cas où ça chaufferait ... Enfin bref, on n'a pas hésités, avec ça on pourra avoir nous aussi notre heure de gloire, et y'en aura plus que pour vous, les Faucons ... "

J'ai la furieuse impression que cette Planète, en bottant le cul du peu d'autorité qui régulait le nid de fous-furieux, a déchainée sur elle un VRAI fléau, pas là pour des ressources ou du pognon, ni même pour détruire l'écosystème. Pire que tout ces "fléaux" réunis : Elle a déchainée le besoin de sang typiquement humain...

Nous voilà arrivés au bloc de détention ( C'est le panneau qui le dit, y'a même un " IT'S STRICTLY FORBIDDEN TO FEED THE ANIMALS ! " marqué en dessous, si c'est pas un signe ça ! ), enfin, au sas qui y mène, sur ma gauche, un circuit improvisé avec des troncs d'arbres comme barrières et une quantité de parieurs qui s'engueulent, leurs voix sont couvertes par les rugissements des moteurs et les crissements de pneus.

" Bon, tu te magnes ? T'auras tout le temps de regarder les courses après... "

Le pilote, avec son blouson de cuir et ses lunettes de soleil commence à s'énerver, j'ai presque envie de rigoler en regardant sa dégaine, mais je vais me retenir, ça ferait tâche ...

" - Vous êtes bien organisés dans ce coin-ci de la base.
- On s'amuse avec ce qu'on peut ... "

J'entre dans le sas, mon pote le pilote et son arc à ma suite. La prison pour bleus, c'est en fait un couloir pressurisé, avec de chaque coté de salles laissées à l'air libre. Bien sûr, il y a les inévitables qui couvre les brèches... Ca fait en effet, Trèèèès pénitencier de haute sécurité. Le bon goût à l'humaine quoi ...

On parcourt quelques mètres le pilote m'arrête devant la cellule de celui que j'aurais sauvé ... C'est en effet un gosse, enfin bon, il doit quand ême faire 2 mètres 10, mais selon les critères indigènes, il est petit pour être un adulte...

" - Je prier vous, taotouté, laissez-moi seul avec taotouté Turok
- Hey, j'suis pas à tes ordres, la bleuette !
- Non, il a raison, dégagez, sinon il va nous faire un caca nerveux et il voudra rien dire, c'est classique ... Sinon je peux toujours dire à Ari que vous avez fait capoter un interrogatoire ...
Et puis bon, ils peuvent très bien se débrouiller sans vous si vous les laissez sans surveillance pendant que vous allez chercher tout les gars qu'ils désirent voir ..."

Le geôlier repart en lâchant des jurons, visiblement, je ne me suis pas fait un pote...

" - Bon, tu me veux quoi... heu ... petit ?
- Moi vouloir remercier toi pour sauver moi, pas beaucoup saotouté être gentil comme ça.
- Ah, ben, de rien ... C'est tout ?
- Oui et non, moi devoir informer toi, moi te suivre dans la jungle avant être poursuivi par palouloukan, moi devoir vie à toi. Mais moi avoir autre chose à dire toi, Eywa protéger toi, être pour ça toi pas mort sur arbre avec nantang. Atokirina venir sur toi pendant toi dormir, et après toi sauver moi, quand toi dormir sans pouvoir moi réveiller toi...
- Oh non, t'en a pas d'autre des conneries du genre ? Tu crois que ton " Eywa" veut mon bien ? J'ai buté des potes à toi cette aprèm', elle a rien dit ? ...
- Eywa choisir toi, moi savoir juste ça, moi sûr !
- Oh putain, c'est bon, t'es complètement félé mon pauvre ... J'me casse !
- Non, toi attendre, toi devoir croire moi ... Toi..."

Je me dirige en courant vers le sas en courant, je n'écoute plus ce qu'il a à me dire, ces bleus me font flipper ...

Faut que je pionce, oublier ça le plus vite possible ...

__________________
- J.26 -

" Hé Turok, viens voir, on a un cadeau pour toi ! "

Je viens de sortir des dortoirs, j'ai la tête dans le cul, et Hadès me hèle depuis le hangar du clan.

Sympa les gars quoi. Je me dirige vers ce fameux hangar, notre QG, orné d'un squelette de .. Léonoptéryx si je me rappelle bien ...

Me voilà à l'intérieur du bâtiment, du rock passe en sourdine, diffusé par des haut-parleurs ornés de divers gri-gris autochtones à chaque angle de la salle principale. Sur tout les murs, on peut voir des peintures de tout et n'importe, quoi, mais ce qui attire l'oeil, c'est le signe "RDA", et juste en-dessous "Rape, Destruction, Anarchy", on sent bien que les survivants ont une dent contre la Corp'...
Je sert deux trois mains par-ci, par-là de types que je connais pas trop. En plein centre du hangar, le Dragon de Booster, sur lequel plusieurs mécanos sont en train de peindre des motifs stylisés tandis que d'autres installent des nids de mitrailleuses sur le toit, et surtout, pas étonnant, Booster qui engueule tout ce beau monde, leur disant de se ... "dépêcher" dirons-nous pour rester poli ...

Hadès m'entraine dans le sas, puis dans un petit local mal éclairé. A l'intérieur, Shogun, Overseer, deux gars avec des arbalètes, et un type ligoté, en caleçon, couverts de tatouages satanistes, sur une chaise avec un sac sur la tête. Hadès passe devant moi, excité comme un gamin à Noël et s'empresse d'enlever le sac de la tête du bonhomme...

"SUUUURRRRRPPPPRRRIIIISSSSEEEEE !" clament toutes les personnes dans la salle, à l'exception du ligoté, qui en plus est baïonné...

"- Ca te fait pas plaisir ?" me demande Shogun. Je dois en effet faire une moue perplexe ...
"- Ben, c'est qui ?
- Le gars qui doutait de tes talents de tireur ! " Me dit Overseer, lui aussi excité comme une puce.
"J't'avais dit qu'on le retrouverais ! Il est pour toi !" Continue-t-il en me tendant un revolver.

Les cons ... J'attrape le revolver, mais j'ai quand même un léger doute. Les paroles du bleu me revienne en tête, je ne sais absolument pas pourquoi, mais elles reviennent " Eywa choisir toi ! "

"Quoi, ça te fait pas plaisir ? Merde ... Soit cool, on s'est donné du mal pour le retrouver !"

Il a l'air vachement déçu, moi je suis immobile, comme un abruti, je ne peux plus bouger, je suis tétanisé, une vraie statue. Shogun me fusille du regard...

"Bon, les mecs, je compte sur vous, ça ne doit pas ressortir d'ici..."

Il dégaine un flingue...
*Blam, blam, blam, blam, blam, blam*
...Puis se ravise...

Putain, j'hallucine, j'ai vidé entièrement les munitions du Revolver sur le pauvre gars, je l'ai tué de sang-froid. J'ai vu ses yeux se révulser quand j'ai porté le canon à sa hauteur, il a à peine eu le temps de couiner avant que je ne lui tire dans la tête, projetant de la cervelle sur le mur, puis au hasard un peu partout dans le buffet.

Shogun a l'air ravi, mais je reste immobile, comme tout à l'heure, la scène repasse en boucle dans ma tête, en accéléré, au ralenti, comme pour me faire capter chaque détail, chaque gramme de cervelle projeté, la trajectoire de chaque balle, la peur de ma victime, son couinement ridicule, l'expression jubilatoire d'Hadès...

"Et bien voilà, tu vois quand tu veux ! Bon, par contre, la prochaine fois, mets-y un peu moins de zèle, y'a des gars qui doivent nettoyer après !
Au fait, le Revolver est à toi, cadeau de la maison !"

Shogun est donc lui aussi complètement siphonné. Hier, je croyais m'être intégré, je croyais connaitre par coeur cette base et le bordel qu'elle est devenu, je pensais que c'était extrèmement simple à comprendre, je croyais être le roi de cette base. Je me trompais. Je suis comme un gamin trop turbulent à qui on aurait administré une douche froide...
Ils sortent tous de la salle les uns après les autres, et je reste seul dans cette pièce, avec le cadavre. Combien de temps, d'ailleurs ? 5 minutes, 10 minutes ? J'en sais rien... Toujours est-il que quand la porte s'est réouverte derrière moi, le sang avait séché, et la cervelle dégoulinée au sol.

" Ari veut te voir dans son bureau ...
Magnes-toi le cul, t'es nécrophile ou quoi ? "

Réveil brutal. J'embarque le flingue, son étui et les munitions et je dégage le plus vite possible du hangar. Au pas de charge vers le bureau d'Ari.

J'arrive dans son bureau, après avoir passé le gorille, toujours aussi loquace...

Ari est en train de jouer au minigolf, la voir avec un treillis ouvert jusqu'au nombril, un club dans la main, c'est heu ... Boarf, toutes façons, plus rien ne m'étonne.
N'empêche, fais vachement chaud d'un coup ...

" Bah dis donc, t'as l'air vachement heureux de me voir, et tout de suite de meilleure humeur ... "

Ah oui tiens, elle a raison, elle lit dans mes pensées ou quoi ?

" Oui, je lis dans tes pensées, et je sais qu'actuellement tu essayes de m'imaginer en bikini sur une plage... "

Elle est vraiment très très forte ...

" Non, en fait, c'est ton pantalon qui t'as trahi. Bon passons...
Tu remarqueras que si je suis sympa avec toi aujourd'hui, c'est juste parce que je comprends ce que tu ressens actuellement... T'as fait un sacré carton d'ailleurs ..."

Elle soupire, mais comment elle sait ce qui s'est passé ?!?

" J'ai l'impression que personne ne sait qu'il y a des caméras de surveillance dans cette base, j'ai d'ailleurs bien rigolée quand Shogun a demandé à ce que rien ne fil ...

Heu, tu m'écoutes ou ... ? "

Elle soupire à nouveau, avant de reboutonner non sans mal sa veste jusqu'en haut.
Je n'arrive pas à retenir un gloussement.

" - ... Franchement si t'es venu juste pour me mater alors que j'essayes de te parler sérieusement, t'aurais pas dû te déranger et aller admirer la blondasse en mini-jupe qui bosse à peindre des petits coeurs sur le Dragon de Booster ...
- Ah non, mais je t'écoute avec assiduité hein ...
- C'est ça, mon cul aussi ... Enfin bref."

Elle sort une bouteille de vin de sous son bureau et deux verres, et moi j'essaye de m'imaginer son cul, justement...

" J'te sert un verre ? "

J'acquiesce, en me demandant ce qu'elle a en tête. elle ouvre la bouteille et laisse le liquide couler dans mon verre, puis dans le sien...

" - Bon, t'as une idée de ce qu'il te voulait le gosse hier ?
- Me remercier, c'est tout ...
- Tu me déçois, moi qui pensait que tu me faisait confiance. Enfin bref..."

Elle porte le verre à ses lèvres et me désigne du doigt la caméra de surveillance, et merde, je les avaient oubliées, elles ...

" - T'as pas une petite idée de ce qu'il disait par " Eywa choisir toi " ?
- Pas la moindre...
- Ben, figure-toi que j'ai plongé le nez dans le bouquin de la Ô combien érudit Dr Augustine, et figure que les "Atokirinas" dont il t'as parlé sont ce que les na'vi considère comme les graines de leur Arbre-mère, directement en lien avec leur "Eywa"...
- Putain, tu vas pas t'y mettre aussi non ?"

Non, mais elle veut que j'arrête de la mater, tout ça pour me rebalancer ces conneries de bleus au nez ? Elle se fout de ma gueule ou quoi ? Je vide mon verre d'un trait en espérant que ça va me calmer ...

" Bon, tu sais quoi, en lisant ce bouquin je me suis fait une petite idée de ce qu'il pourrait dire moi ... "

Elle se lève avant de passer dans mon dos et de prendre ma nuque dans ses bras

" - Tu fous quoi là ?! "
- Tu permets que je t'examines le cou deux secondes ?"

Je soupire.

" Magne-toi ... "

Elle émet un grognement d'approbation au bout de quelques secondes, avant de se rassoir à son bureau. Je crains le pire...

" C'est bien ce que je pensais, fouille dans tes cheveux, rends-toi compte par toi-même ... "

Je porte ma main à ma nuque, remonte doucement et ... OH PUTAIN DE ... Y'a un truc de vivant dans mes cheveux ! Et en plus Ari est morte de rire, mais c'est quoi ce truc ?!?

" - Je crois que tu es le premier cas typique de tentative de prise de contact entre Eywa et nous, ou un truc du style... C'est marrant, elle essaye la diplomatie après l'opération coup de poing ...
- Tu ... tu pourrais pas tenter de me traduire ça en français s'il te plait ?
- T'es en train de muter Turok ... "

__________________
-J.26 - 14:00 Heure Terrienne

J'ouvre les yeux, ce n'était donc qu'un rêve ? Ou alors je suis mort, ça expliquerait la forme auréolée de lumière devant moi ... Un ange ?

" Bah dis-donc, il en faut peu pour te faire tourner de l'oeil, gros dur ... "

Ma vue s'éclaircit, et mes soupçons se confirme, c'était juste Ari, et apparemment je suis dans sa chambre, et dans son lit ... Elle est assie à mon, enfin à son chevet ...

" Bon, j'imagine que j'ai été trop brusque, mais les faits sont là mon gars ... T'as une prise qui pousse dans le cou, et j'imagine que tu va petit à petit te transformer en avatar ... mais sans pilote ... "

Je déglutit un bon coup, difficilement ...

" Mais bordel, pourquoi moi ? Qu'est ce que j'ai de plus que n'importe quel autre putain d'allumé sur cette base ?!? "

Elle a l'air exaspérée par ce que je viens de dire, choquée même.

" " N'importe quel autre putain d'allumé " ?
Tu t'écoutes au moins ? Tu veux que je te dise ce que t'as de plus que " n'importe quel autre putain d'allumé " ? "

Elle se rapproche de moi encore un peu plus, et balance, énervée :

" Regarde-toi, fouille au fond de toi, merde ! "

Elle me colle violemment son index sur le front, comme pour m'enfoncer un truc dans le crâne.

" T'es gentil, t'y peut rien mon pote, c'est un fait. T'es un gentil, et tu peux pas t'en empêcher, à aucun moment ! "

Je refuse de croire de telles conneries ... Je vois clair dans son jeu, elle tente de me manipuler, elle veut monter tout en haut de cette putain de hiérarchie pour que tout le monde soit à ses pieds.

" Et le gars que j'ai buté ? Va pas me dire que c'était le gentil qui parlait ? Et tout ces bleus que j'ai défoncé à la mitrailleuse ? Tu les oublient, eux ?"

Elle enlève son doigt de mon crâne, et se dirige, définitivement enragée, vers la fenêtre.

" Me dit pas que tu prends plaisir à buter tes congénères... Je t'ai vu, t'hésitais, tu te chiais dessus ! Et tout ces bleus ... Tu les connaissais au moins ? Tu crois les avoir vu crever en face de toi ? Tu parles, pour toi, c'était un jeu vidéo, t'y prenais plaisir parce que tu butais des inconnus à distance via une caméra thermique ... Tu connais rien de ça, t'as jamais été au sol, t'as toujours survolé ... T'étais à deux doigts de dégueuler quand t'as buté ce type, et tu crois pouvoir me donner des leçons sur ÇA ?
Tu crois que je serais là où je suis si j'avais buté personne ? Si j'avais rien fait, je serais dans le harem de cette obsédé alcoolique de Booster ...
Non, mais j'hallucine, t'es gentil, assume ! T'y peux rien mon pauvre, et la "déesse" des bleus le sait, la preuve, t'as même sauvé un gosse en affrontant un Thanator, n'importe quel type ici aurait attendu que la bête le bouffe pour ensuite dépouiller le cadavre...
On est pareils mon pauvre, sauf que moi j'ai dû le refouler ..."

Elle actionne l'ouverture des volets de la baie vitrée de sa chambre, dévoilant en contrebas les Parkings de Cygnes et de buggys, près desquels a lieu une bagarre entre deux clans à coups de poings et d'armes blanches. Plus loin, on peut voir une arène, près du circuit que j'ai aperçu la veille, dans laquelle s'affrontent deux AMPs armés tels des gladiateurs, au milieu d'une foule en liesse.

" Tu crois que je suis heureuse de voir ça ? Tu crois que ça me fait plaisir d'être réveillée toutes les nuits par des coups de feu échangés entre type censés se serrer les coudes ? Tu crois que ça me fait plaisir d'être obligée de me balader armée pour dissuader le premier abruti venu de me violer dans le couloir ?...

Ah putain, ils sont beaux les nouveaux... T'as rien connu du début ! Tu crois pouvoir débarquer comme ça en donneur de leçons, juste parce que tu t'es fait accepter par une bande d'alcooliques ultra-violents en descendant un pauvre gars qui ne te voulait rien ? Et encore, même ça, t'as pas pu le faire correctement ! "

J'y crois pas, elle a carrément pétée un câble ou quoi ? Faut la calmer là, je sens que ça va mal finir ...

" - Bon, calme-toi, c'est bon, j'ai compris là ...
- Non, justement, tu n'as RIEN compris, t'es qu'un gamin immature ! Figures-toi, petit con, que t'es bien le seul à qui j'ai déballé tout ce qui me pesait sur la conscience comme ça, et que j'ai pas envie que tu te foutes en l'air. Tu te rends peut-être pas compte de ça, mais ta mutation, que tu dois prendre comme une malédiction, c'est une putain de chance ! T'es peut-être même mon ticket de sortie de cette foutue base !"

Elle va trop loin, j'en ai ras-le-cul de ces conneries, c'est qu'une foutue gamine qu'à besoin de se faire calmer, merde quoi !

" Tu sais quoi ? Va te faire foutre ! Tu veux que je te dise ? Je doute franchement que t'ai eu à pointer le moindre flingue sur qui que ce soit ! T'es qu'une allumeuse opportuniste qui a couchée avec le Big Boss du secteur pour avoir ta place, t'en a rien à foutre que je te mates, t'as besoin qu'on s'intéresse à toi, ça t'apportes quoi de te désaper comme tu le fais ? Ton seul avantage, c'est ton physique, et tu l'exploites à fond. C'est tout ce que j'avais à te dire, maintenant, je me casse."

Je me lève, prends mes affaires et me dirige vers la porte. J'entends un petit rire de gamine derrière moi, c'est bien ce que j'ai pensé, elle est pas plus saine d'esprit que n'importe qui sur cette base ...

" Je crois pas que tu saches de quoi tu parles, ça non ... Et tu fais une connerie là, une très grosse connerie ... "

Je m'arrêtes juste avant de franchir le seuil

" Et tu crois que c'est juste avec ton décolleté vertigineux et ton beau sourire que tu va me retenir ? Tu te trompes sur toute la ligne, je suis pas un de ces gros bonnets que tu fait ramper à tes pieds en les foutant dans ton pieu... "

Je passe la porte et m'engage dans le couloir ...
Je l'entends courir et sortir.

" T'es navrant, petit con ... "

J'entends un bruit sourd avant de basculer dangereusement vers le sol, je ne contrôle plus rien ...

LA CONNASSE ! Elle m'a tiré dessus !

- J.27 -

Woh, putain, ça fait trop mal ! Elle m'a shooté en plein dans les jambes ... ou alors elle m'a shootée ailleurs mais m'a découpé les jambes à la machette pour pas que je m'échappe ...

" - Bon, et maintenant, tu va te tenir tranquille et arrêter de douter de ma capacité à buter des hommes ?
- Va te faire ...putain ... Va te faire foutre ! J'te jure que ... dès ... je sors de ce ...argh ... ce pieu... Je te fais... bouffer ton soutif' !
- T'as pas perdu ton sens de l'humour, c'est déjà ça ... Maintenant au moins, si tu essayes de me faire faux-bond à nouveau, tu sais à quoi t'attendre ...
Ah, et deux trucs :
Primo, dorénavant tu dormiras sur le canapé parce que t'as tenté de me jarter toute la nuit du pieu...
Secundo, ta transformation a l'air de s'accélérer ... Ta natte te descends jusqu'au milieu du dos, et t'es franchement pâlichon, à tirer sur le violacé ..."

Hier encore, j'aurais prié pour passer la nuit avec elle, aujourd'hui je me demande pourquoi j'ai pas tenté de la buter pendant qu'elle pionçait ...
Mais ce truc qui m'as poussé dans le cou ... Je le sens bouger mais j'ai aucun contrôle dessus, c'est intrigant et flippant à la fois. Je porte ma main à portée d'yeux, et je comprends maintenant de quoi elle parlait quand elle disait que j'allais me transformer en bleu ... Non mais bordel ... Visez un peu ça !... Ma main est couleur azure ... Putain de merde ... PUTAIN DE MERDE ! Mais je veux pas devenir bleu moi ! ...

" - MEEEEERDE !
- Calme-toi ... Je vais aller consulter les bleus à la prison pour savoir ce qu'il se passe, toi, tu reste ici, et SURTOUT tu ne bouges pas ... si on te vois ici, tu va avoir un nombre assez hallucinant de types rancuniers au cul, je te laisse deviner pourquoi ..."

Et sur cette déclaration, elle embarque un flingue et sort de la pièce, me laissant seul ...
Je me lèves, pour me rendre compte des dégâts ...
Ça s'arrange pas, je devient bleu et j'ai une natte qui me pousse dans le cou... Putain, il s'est passé quoi cette nuit ?... Un bandage comprime ma jambe, qui elle aussi vire au bleu foncé. Ah, et comme si ça suffisait pas, cette garce m'a foutu en caleçon ...
A bien y regarder, c'est tout mon corps qui vire au bleu, et cette natte ... Y'a des tentacules roses qui se baladent dedans ... J'hallucine, un poulpe se balade dans mes cheveux, et le pire c'est que je souffre le martyr, à cause de ça ou de ma jambe, je sais pas trop ...
Je reste béat devant ce qui était mon corps pendant facilement 10 minutes, avant de commencer à explorer la chambre dans laquelle je suis retenu prisonnier. A regarder tout ce qui est présent dans cette chambre, ça ne fait aucun doute qu'Ari a des origines japonaises, et ne cherche pas à les refouler, elles ...

Je baigne dans une atmosphère à la fois high-tech et ancestrale dans cette chambre assez vaste ... Tout le plancher est remplacé par des tatamis et au milieu de cette pièce d'un blanc immaculé, il y a une holo-table basse avec une planète, Pandora, enfin j'imagine, je ne reconnais aucun continent terrestre, et il y a trop de vert pour qu'elle correspondent aux photos de la Terre vu de l'espace que j'ai pu observer... Putain, c'est quand même vachement beau ... Toutes ces lumières sur la face sombre, violettes, mais aussi plus blanches, sûrement d'autres bases humaines ... Sont-ils tous dans notre situation ?

La canapé que mentionnait Ari est immédiatement situé en dessous des immenses baies vitrées qui parcourent toute la face Est de la salle, celle du Soleil-Levant ... Avec le lit, une sorte d'ordinateur et une télévision, le canapé est le seul élément de mobilier typiquement "occidental", au sens terrien du terme. Partout ailleurs, on peut voir des éléments sûrement issus du pays natal d'Ari : Une sorte d'autel religieux je pense, avec ce qui doit être des fruits locaux dans une assiette et deux bougies à coté ( Je préfère ne pas y toucher, simple mesure de sureté pour mes jambes, je manque déjà assez de me viander à chaque pas à cause de la douleur ... ), une bibliothèque dans un superbe bois rosée avec des centaines d'ouvrages comme ... "Le Bushido","Histoire du Japon du VIIème siècle à nos jours" ou encore "Le Shintoïsme"... C'est quoi ces trucs ? Bon, passons, faudra que je lui demande quand elle reviendra. A coté de cette bibliothèque, il y a une commode faite dans le même bois, sur laquelle repose des photos d'Ari petite fille, avec d'autres bridés ... Surement papa-maman, tout ça dans des environnements qui ressemblent furieusement à la pièce dans laquelle je me trouve, au niveau décoration, ou, pour certaines photos de celui que j'identifie comme Papa, dans des endroits verdoyants typiquement pandoriens en compagnie de na'vis ... Y'en a même une d'Ari gamine en train de jouer avec des mômes bleus !...

Au centre de cette pièce de mobilier, un présentoir avec deux sabres l'un en dessous de l'autre, un petit et un grand, un très grand, tout deux tranchants vers le haut...
A ma droite, un autre râtelier fixé au mur, avec des lances, un arc colossal qui n'a pourtant rien à voir avec un arc de bleu, et divers sabres, épées, dagues, ou, plus original, des sortes de masses en bois renforcées de métal et une lance gigantesque avec une lame de sabre au bout. A coté de tout cet attirail moyen-ageux, il y a un espèce de porte-manteau soutenant une armure comme celle qu'on avait l'habitude de voir dans les dessins aimés japonais de quand j'étais gosse, sur Terre... Sauf que là, c'est manifestement pas un robot, et qu'elle est faite pour être enfilé par un humain, et qu'elle ne contient rien qui puisse cacher une arme laser ou une minigun... Je me demande si il y en a qui se battait réellement avec ça à une époque ... Ca fait deux choses à demander à Ari déjà ...
Près de tout ce bazar archaïque, il y a un autre emplacement de rangement, qui me parle déjà beaucoup plus ... Il contient plusieurs armes à feux, certaines remontant sûrement aux Romains ... Attendez, elle sont datés, juste en dessous d'une des plus rustiques, il y a marqué " Arquebuse d'Ashigaru, XVIème siècle ". Bah ça me rajeunit pas, juste en dessous : " Pistolet-mitrailleur Type 100, Kijiro Nambu, Seconde Guerre Mondiale, 1939-1945 " Oula, elle est antiquaire Ari ? Putain, y'a que des flingues de la préhistoire ... en dessous, deux " Pistolet Nambu Type 14, Kijiro Nambu, Seconde Guerre Mondiale, 1939-1945 ", ou celui avec une baïonette là : " Carabine Arisaka Type 44, 1911-1945 ", un autre avec une baïonnette " Fusil Type 89, Howa, 1989-2024 ", un complètement différent avec des lampes des viseurs lasers et tout " Fusil ZR-68C, HRY, 2024-2112 ", 3 qui ressemblent beaucoup à ce qu'ont en dotation les mercenaire " Fusil MX-5, JN Industries, 2112- Toujours en service " ou encore une paire de variantes d'un " Fusil à pompe SUPA-7, Murata, 2125-Toujours en service"...

Tu parles ! Y'a que des antiquités ou de la camelote japonaise ... Elle doit vraiment être attachée à son pays pour garder autant de merdes !...

Je me retourne pour continuer mon exploration. Autour de cet armurerie, il y a une zone délimité par des bandes rouges sur le tatami, assez grande et entièrement vide, aucune idée de ce à quoi ça peut bien servir, mais ça prends bien un quart de la chambre ... Enfin, elle est tellement grande que bon, y'a encore de quoi faire autour. Le lit où je dormais, enfin, le pieu d'Ari, et à quelques pas à peine de la porte, juste au dessus, il y a un drapeau japonais et divers posters de monuments asiatiques : La fameuse Tour de Tokyo, un palais au milieu d'une forêt ( Je savais même pas qu'il pouvait encore y'avoir des arbres sur Terre, à moins que ça ne soit un vieux poster... ), une montagne superbe en plein hiver, une espèce de portail rouge devant un temple en forêt et une photo du Tokyo nocturne...

Plus loin, près des fenêtres, il y a un frigo avec du matériel de cuisine ainsi que de la vaiselle...

Y'a au moins un bon point à accorder à cette chambre, c'est que c'est réellement un Havre de Paix organisé si on exclut les bruits ambiants d'entrainements, d'hélicoptères ou de tirs de tourelles automatiques...

Je me suis fourré sur le canapé à lire un des livres d'Ari sur l'histoire du Japon quand elle revient enfin, d'humeur apparemment radieuse. Le soleil s'est couché depuis un bon moment déjà...

" - Elle te plait la déco à ce que je vois ?
- C'est sympa ... Et c'est la seul chambre organisée que j'ai vu depuis que je suis revenu ici. Au fait, tu ...
- Oui, je suis japonaise, j'ai 19 ans et j'ai quitté la Terre à 12 ans avec mes parents pour venir ici, donc théoriquement, j'ai 25 ans si on compte les années passées au frigo. Toutes ces armes et ce mobilier, ils appartiennent à ma famille, et mon père les a emmené avec lui, d'ailleurs, c'est censé être la chambre de mes parents ici..."

La vache ... En fait, on a le même âge ? J'ai même pas envie de penser à tout ce que je rate en devenant un bleu...

" - ... Mais pas la peine d'insister, t'aura rien sur eux, ils ne sont juste ... plus là...
Bon, t'as les crocs j'imagine ? Tu veux manger ?
- Ce serait pas de refus en effet ...
- Ok, en à table alors ... Gros veinard, profites-en bien, tu risques pas de bouffer de la nourriture humaine naturel avant un bon moment !"

...

Elle avait raison, j'avais jamais rien bouffé d'autre que des algues sur Terre et des rations boostées à l'azote ici, alors de la bouffe japonaise ... Ici en plus ?

" - Où t'as eu tout ça ?
- J'ai mes contacts ... Y'a sur cette base quelques contrebandiers qui font la navette entre d'autres bases et nous ... Je m'arrange pour leur fournir des armes, et eux me fournissent de quoi bouffer correctement ... Et accessoirement des matières premières pour l'usine. Ça sert d'être la seule personne à s'occuper de ça dans la base. Tout le reste s'en fout, suffit que je casse et ... Clac, tout se désagrège, plus de ressources, plus de bouffe, plus de munitions, plus de matériel ... Entièrement à la merci de cette planète ! J'ai la chair de poule rien que d'y penser !...

Bon, maintenant, au lit !
- Heu, attends, les bleus, ils t'ont ...
- Plus tard ... C'est l'heure de pioncer là ..."

C'est louche, elle voulait me buter ce matin et hier, maintenant elle est toute guillerette, ça cache un truc ...

" Ah, mais viens dans le lit ... désolée pour ce matin ... j'étais énervée ... C'est pas grave que tu me pousses ... J'ai froid toute seule ... "

Ça cache un GROS truc ...

- J.28 -

En fait, ça ne cachais rien. Je lui ai juste tenu chaud, c'est tout ... Putain, je regrette, franchement, je sais pas ce qui m'a retenu ...

" Ari, Arrrrriii ? "

Oh merde, une pareille voix flutée ici ... Je crains le pire ...
Ari semble toute paniquée, elle me chuchote à l'oreille

" Oh merde, trouve un endroit où te planquer, c'est le chef de l'"Autorité", le clan des hauts-gradés ... Si il te trouve ici il va t'éviscérer ... "

Je me lève en sursaut et ... La porte s'ouvre ...

" Ari ? t'es où bé... OH PUTAIN D'SA MERE ! "

Grillé ... Le mec dégaine un flingue en panique avant de me viser

" - T'es qui, bâtard de bleu, tu branles quoi dans la chambre d'Ari ? J'vais t'ouvrir en deux et te faire bouffer tes viscères !
- Calme toi César ! Qu'est ce que tu voulais ?...
- Connasse ! J'pensais que tu m'aimais vraiment et je te vois avec ... avec un bleu ?!? Sors dans ce putain de couloir, faut qu'on parle !
- Ok, ok, attends que je m'habille ... "

Une baraque noire qui fait l'excité de service ... Ca m'aurait à peine étonné qu'il soit le chef de la base ... plus cliché tu meurs ...
Il ne peut s'empêcher de lorgner de l'œil Ari qui se lève du lit, nue, tu m'étonnes qu'il a dû avoir un sacré choc ... Non, franchement, j'arrive pas à m'empêcher de rire.

" - Arrête de rire bouffon, ou j'te jure que je fait sauter les bijoux de famille avec du plomb !
- Et si j'te réponds non, tu fais quoi p'tit marrant ?
- Putain d'connard d'merde, tu l'aura cherché celle lààààaaaaarrggghhhh ... Oh putaaaaiiinn ... Connaassse ..."

Une lame lui ressort du ventre à travers le blouson de cuir, j'avoue être aussi surpris que lui ... C'est Ari qui l'a planté, et qui ne l'a pas loupé ...

" Où est ce que t'as vu que j'étais amoureuse de toi, gros porc ? " qu'elle balance avant de lui trancher la gorge avec une autre lame. Impressionnant ...

" - Joli spectacle, bien joué ...
- Y'a quoi de "joli" pour toi là-dedans ? T'aimes réellement voir des cadavres, je me trompe sur ton compte depuis le début ? N'es-tu qu'un boucher de plus, mais sans les couilles nécessaires pour assumer sa passion ? Si pour toi, c'est réellement "joli", alors tu me dégoûtes ...
- Tu me fais flipper là ... On dirait une bleue ..."

Elle a l'air choquée par ce que j'ai dit, mais je sais pas réellement pourquoi ...

"- Pas une bleue, une Na'vi, retiens bien ce mot. Je t'assure que ces personnes, elles sont bien plus "humaines" que nous ... Maintenant, on va être obligé de décamper, ils vont pas tarder à vouloir venir chercher leur copain, et à ce moment, il faudra être parti ...
- Attends deux secondes ... Tu veux aller où là ?
- Au Kelutral, l'Arbre-Maison ...
- Oh non ... me dit pas que ...
- ... Si, on va chez les na'vis, et que tu le veuilles ou non, on t'embarque !
- Qui ça "on" ?
- Moi, et les Na'vis.
- Putain de ... me dis pas que ... ?
- Si, on va les libérer !
- Mais bordel de merde ... t'es complètement givrée !..."

Elle ne prends même pas la peine de me répondre et découpe la tête de l'ancien chef de la base ... Bon dieu, mais elle est folle ... Ca pisse le sang, cette expression de stupeur dans laquelle elle a été figée, c'est dégueulasse...

C'est pas humain de faire ça !

Elle se dirige maintenant vers les râteliers pour en sortir deux des MX-5 de l'armée japonaise et d'ouvrir un coffre juste en dessous, contenant un nombre impressionnant de pièces de matériel en tout genre, et des munitions. Elle en extrait deux gilets pare-balles, plusieurs chargeurs, deux baïonnettes et un casque. Elle me tends un des gilets, une baïonettes, des chargeurs et le casque

" - Enfiles-ça ... On doit frapper fort, créer le plus de merdier ici avant de se barrer ...
- T'as pété un câble ou ...
- Tu la fermes et tu t'exécutes, on a tué des chieurs comme toi pour moins que ça de temps de mon arrière-arrière-arrière grand père ! Et ne t'avises pas de te plaindre de ce matériel, les merdes produites par la RDA sont bien moins fiables et efficaces"

Oh non, putain, j'espère que cette dingue de jaune ne va pas me forcer à faire une attaque kamikaze sur les tanks ...
J'ai pas le choix, j'enfile donc des vêtements ( enfin surtout de quoi cacher toute parti du corps tirant sur le bleu, soit tout sauf ma tête, encore heureux que la natte ne soit pas un critère de soupçons ... ), le barda et prends MON revolver, mon meilleur copain après tout, celui avec qui j'ai tout traversé ... enfin, presque...
Presque rien en fait...
Ari s'habille elle aussi, enfilant un blouson de cuir rouge avec un écusson de l'armée japonaise, avant de se diriger vers l'autel pour y faire une offrande, j'imagine, elle se mets à genou avec les deux sabres pris sur le présentoir et un bandeau aux couleurs du japon, afin de l'enfiler lentement en prononçant des trucs incompréhensibles, surement du japonais, et de les ceindre à sa ceinture, façon rituel ...
Elle a dû fumé le tatami ...
Elle prends aussi l'espèce de lance, l'arc et récupère un carquois

" Naginata et Yumi ..." Me dit-elle
" Heu ... Enchanté ..."

J'ai le droit à une tape sur la tête façon " Abruti ! ", charmant ...
Elle me tends une espèce de long couteau

" - Un Tanto, garde-le avec toi, tu pourrais en avoir besoin ...
- Tu te fous de moi ?
- ... Estime-toi heureux, tu ne devrais pas même y toucher ...
- Et ton père, il dirait quoi si ... "

J'ai à peine le temps de finir ma phrase que le plat de son sabre se retrouve à coté de ma gorge

" Je T'INTERDIT de parler de ça, il ne dirait rien ! Écoute petit rigolo, je suis dans une famille composée de samouraïs depuis bien avant que ton pays d'obèses accros au profit ne soit fondé ! Et je pourrais te tuer sans même que tu ne t'en rendes compte avant que tes tripes ne se répandent sur le sol, alors un peu de respect pour les choses qui te dépassent ! "

Comme ça au moins, c'est clair

" Maintenant en route, et pas un mot de plus ou je t'arrache les cordes vocales ! "

C'est très clair, même ... On sort maintenant de sa chambre, surarmés et apparemment, enfin pour elle, avec la rage de vaincre, ou de tuer, c'est selon ...

On prends l'ascenseur, on arrive dans les couloirs ou se situent ses bureaux, on avance, premier tournant, vers la gauche, premier garde, elle lui saute dessus comme une sauvage avant de le foutre à terre et de dégainer son sabre court pour l'égorger...
Elle est folle cette fille ... Folle, mais foutrement efficace ...

On arrive devant son bureau et elle égorge froidement le vigile en exosquelette qui pionçait devant, heu, veillait sur sa porte. Pas une grosse perte lui, il avait pas beaucoup de conversation...

On pénètre maintenant dans le sas et on récupère des masques. On sort, paf, déjà 3-0 pour Ari, et je commence à douter à la fois de sa vision de la discrétion et du fait qu'elle déteste tuer. On descends les escaliers et on arrive sur la piste, elle est déjà nettement plus calme, ça fait trois types qu'on croise sans les tuer. On se dirige vers le parking des Cygnes...
Ca n'aura pas duré longtemps, elle vient de planter un mécano qui bossait sur un cygne converti en transport de troupes et lui a pris les clés.

"Monte."

Je m'exécute à nouveau, et elle mets les gaz à fond sur le pénitencier improvisé. Arrivé à mi-chemin, les sirènes d'alarme commencent à retentir, on a donc fait forte impression... Et accessoirement, on est pour l'instant insoupçonnable, qui aurait pu zigouillé des gardes et le chef du coin à l'arme blanche dans la chambre même d'Ari ? ...

Oui, c'est ironique ...
On arrive à la prison pour ble... heu, na'vis ( Je m'entraine, ça risque d'être dur de changer du jour au lendemain ... ). L'alerte a fait des émules, il y a toujours autant de foule devant les courses ...
On passe dans le sas sans enlever les masques. Ari ouvre la porte, dégaine son revolver et envoie un pruneau dans le buffet de mon pote le gardien de prison... Le pauvre, son joli manteau est tout tâché ... J'aurais presque pitié de lui si ...
Si rien du tout en fait, ce type là m'est tout sauf sympathique, avec du recul, cette charogne doit même maltraiter ses détenus...
A peine entrée dans le sas, les na'vis, paniqués au début, sont tout joyeux, comme des chiens qui voient revenir leur maitre après plusieurs jours d'absence ...
Ils s'exclament à l'unisson

" Takara ! "

Elle se retourne vers moi

" - Oui, parce que comme toi avec Turok, Ari n'est qu'un pseudonyme, mon vrai prénom, c'est Takara. Soit heureux Turok, t'es la seule personne humaine à détenir cette information ici ... J'ai buté la dernière à être au courant il y a moins d'une heure ...
- Charmant, vraiment.
- Assez."

Sur ce mot, elle utilise son fusil pour détruire une à une toutes les vitres, faisant résonner l'alarme signalant l'incursion d'air hostile dans le couloir.

" Maintenant, on dégage ! "

Et nous voilà dans le sas, qu'Ari ... heu Takara ( Oh putain, ça fait trop de choses auxquelles s'adapter ... ), a désactivé pour que les Na'vis puissent passer sans respirer "notre" air qui leur est toxique ... enfin je pense, sinon pourquoi désactiver le sas ?

Ils embarquent tous à l'arrière du Cygne bâché, et Ari procède à une distribution de matériel récupéré sur les différents types qu'elle a occis. Voir des bleus avec des armes à feu, c'est drôle et flippant à la fois... Merde, j'ai encore dit "bleu" ? ... Bon, enfin bref, les voir avec nos armes, c'est flippant, parce que je ne sais même pas si ils savent s'en servir ...

En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, nous voilà de retour au hangar des Faucons, près du bureau d'Ari ... Erf, Takara. Le Samson d'Overseer est sur le tarmac. Elle descends, Overseer est en train de trifouiller dans son hélico, mais Shogun est à coté et la voit, il se dirige vers elle avec un air enjoué et jovial, les bras ouverts. Je crains le pire.
Shogun la serre dans ses bras, elle lui rends son étreinte, émouvant, on pourrait croire à une rencontre entre un Biker et sa petit copine ... Joyeux d'abord, comblé même, un air surpris traverse ensuite le visage de Shogun, qui n'a apparemment rien compris, avant que ce ne soit un air révolté quand, enfin, il a tilté. Celui-ci s'effondre au ralenti, maintenant, un trou bien visible et sanguinolent au milieu du ventre, sous le regard de fer de Takara qui n'a même pas daignée baisser les yeux. Overseer, témoin de la scène, a un air ahuri à la barre de son Samson, il descends lentement, un revolver à la main, il braque son arme sur Takara. Trop tard pour lui, elle a déjà tiré. Efficacité contre rapidité, il n'avait aucune chance...

Pauvre type, il me manquera ...

" TUROK ! MAGNE-TOI ! RAMENE LES NA'VIS, ON SE CASSE ! "

Ce cri me sort de ma torpeur, j'ai rien pu faire pour empêcher ce massacre, sur des inconnus ou des types que je ne connaissait pas, je n'ai eu aucun remord, mais là, merde. On a bouffé ensemble, tué ensemble !...

Des tirs retentissent, ça y est, les Faucons ont remarqué la boucherie, ils sortent du hangar des fusils et des arcs à la main. Les na'vis sortent eux aussi de leur couvert et commencent à tirer à la volée.
Je les suit et use de la même stratégie, avant de monter dans l'hélico, et de décoller, soute pleine, j'avais de la chance, Overseer avait déjà fait chauffer le moteur. Sans ça, on serait déjà morts... En parlant de morts, on a perdu deux de ces bleus, deux de ces putain de bleus pour qui Takara a massacré une douzaine de ses congénères ...

Mais merde, qui suis-je pour ne pas avoir empêché ça, et qu'est ce que je fous dans une merde pareille ?


- J.?? -

J'ouvre les yeux sur une porte blindée.

" On se bouge, va y'avoir de l'action dehors ! " Me gueule un mec en me foutant un fusil entre les mains.

C'est quoi ce délire ? Je suis où là ?

Je suis inconsciemment un escadron de types en exosquelettes qui sortent de la salle, mené par le gars qui m'a refilé un instrument de mort. Je ne suis même pas maître de mes mouvements ... Il se passe quoi ?

On sort du bunker insalubre dans lequel on était planqués pour sortir à l'air libre...

Plein phares sur une vision d'apocalypse, le ciel est rouge sang et une planète géante nous surveille. Je peux sentir la poudre et j'entends des bruits de combats partout autour de moi. On progresse dans des tranchées creusées dans le bitume qui remontent lentement vers la surface. Les virages se suivent et se rassemblent, au détour de l'un d'eux, je peux voir un type tirer à découvert sur des choses que je ne peux identifier, avant d'être projeté en arrière, mort. Des Scorpions nous survolent en délivrant leurs munitions sur l'inconnu et des AMPs enjambent notre refuge à intervalles réguliers, l'arme à la main. J'ai dû mal à distinguer ce qui se passe, mis à part qu'on est dans le chaos le plus total...

Nous voilà dans la dernière ligne droite, et au fur et à mesure du sprint final, une structure se dévoile pour finalement révéler le gigantesque bâtiment principal d'Hell's Gate, sa tour de contrôle arrachée et en grande partie déchiqueté, des morceaux entiers disparus dans des cratères. Partout autour de moi, tout n'est que poussières, cadavres et carcasses calcinées qui jonchent le tarmac. Je tire vers un batiment éloigné, au hasard en le chargeant, comme toute mon escouade, avant de m'effondrer, je ne peux plus rien bouger, j'halète, j'agonise...

Je rouvre les yeux sur un type, probablement un toubib, en train de me faire des bandages à même le sol, ou milieu de mon sang ... J'aperçois en bougeant la tête des dizaines de types, s'affairant dans tout les sens ...

La radio du doc grésille, j'entends des trucs incompréhensibles, des noms de codes. Mon sauveur me traine en arrière, en tirant dans la direction où tout le monde défouraille...

" Ksshhh ... Down ! je répète : Ils déclenchent la plan Hammerdown ! Repli génér ... Kssshhh ... DECROCHEZ ! PLANQUEZ-VO ... Kssshh ... "

Puis plus rien, plus aucun son de tir, plus de rotors. Le temps est comme suspendu ...

Un éclair aveuglant tombe du ciel à l'horizon, quelque part dans la base. Tout le monde s'est arrêté de tirer et regarde sans bouger. Un champignon d'un blanc immaculé se forme sous nos yeux, puis tout s'emballe. Un son assourdissant se fait entendre, ceux qui ne sont pas en train de tenter de s'arracher les oreilles lâchent leurs armes pour s'enfuir en courant. Une onde de choc passe et on peut voir dans le ciel tout les appareils en vol déconner et commencer à tomber les uns après les autres dans un boucan horrible. Les pauvres bougres partout autour de moi commencent à se désagréger à vue d'oeil. Je baisse les yeux sur mon corps, pour ne découvrir qu'un squelette roussi, comme tout le monde autour de moi, je suis en plein milieu d'une fournaise ...

Cette scène a duré moins de trente secondes, mais il ne reste plus rien de vivant autour de moi ... Des squelettes, des carcasses brulées. L'air est saturé de cendres et de la fumée s'échappe du sol craquelé. Je peux voir le champignon s'élever plus haut que les nuages et les bâtiments encore debout de la base s'effondrer les uns après les autres comme des châteaux de cartes.

Après ça, plus rien ... Le néant ...

- J.29 0930 Heure Terrienne
Je me lève en sursaut en me tâtant le corps ... Je suis encore entier, ce n'était qu'un rêve, mais putain, quel réalisme ! ... J'ai la chair de poule rien que d'y repenser, mais qu'est ce que ça voulait dire ? ...

Je tourne la tête pour me changer les idées et observer ce qui se passe aux alentours. A première vue, je suis dans l'hélico, dans la soute ... Je sais pas qui a piloté sur la fin, Takara ou un des na'vis, mais on a atterri à coté d'un des arbres gigantesques qui servent de nid aux bleus ... Le nid de l'ennemi ... Ou de l'ami ?
J'ai définitivement trop mal au crâne pour y penser, je ne sais même pas d'où il vient, à croire que ma tête est encore dans le brasier de mes songes ...

" Alors le héros, tu te remets ? "

Une voix familière s'immisce dans mes pensées maintenant ? ...
Ah, non, c'est Takara, qui vient s'installer à coté de mon lit improvisé.

" Trois jours dans le coma ! Ca te prends souvent ? ... "

Ok ... Alors attends deux secondes miss, j'ai un petit truc à rectifier ...


- J.32 0931 Heure Terrienne-

... Je déteste louper des épisodes ... Je m'extirpe de mon "lit", enfin, des caisses et de la couverture qui remplissent sûrement ce job depuis trois jours, et part explorer les lieux alentours, poursuivi par la psychopate qui tente d'engager la conversation ... ou de me faire un topo ... Ou peut-être même en train de me proposer de coucher avec elle... De toutes façons je comprends rien à ce qu'elle dit, mon cerveau est attaqué à la truelle et j'ai du mal à me concentrer déjà sur le fait d'observer les alentours.

Toutefois un truc attire mon attention, y'a des bleus bizarres, là-bas, sur un arbre, à attendre les jambes croisées, ou à veiller ... Ce na'vi, là, il a ... du matos humain ?

J'ai jamais vu ça ... Il scrute la forêt à travers la lunette d'un fusil et a un casque sur la tête, couplé à un gilet pare-balle bien trop petit pour lui. J'hallucine, depuis quand ils jouent les résistants ?

" Hého ! Tu m'écoutes ? " Gueule Takara en s'interposant devant moi.
" - Calmos ! J'suis à toi, tu m'excuseras, mais j'ai l'impression qu'on m'a atomisé le cerveau ...
- Bah figures toi que c'est pas loin ! "

Houla ... Je crains le pire là ... Elle sort une tablette ordinateur d'un des filets à matos de secours au dessus de mon pieu et débranche deux câbles reliés à ma natte que je n'avaient même pas remarqués ...

" Bon, accroches-toi, c'est pas joli à voir ... " Dit-elle en me montrant l'écran
" Ca, c'est ton cerveau d'il y a 3 jours ... "

Un joli sac de noeuds de toutes les couleurs mon cerveau, ... Elle appuies sur une petite flèche à coté de la radio sur l'écran.

" Et ça, c'est ton cerveau aujourd'hui ... "

... Je comprends pas, c'est toujours un sac de oeuds de toutes les couleurs, avec ma natte derrière ... enfin je pense ...

" - Je vois pas la différence, à part la natte je veux dire ...
- Ben ... Si tu remarques bien, maintenant, t'as trois hémisphères, la troisième est relié à ta natte ... C'est sûrement de là que vient ton mal de crâne ...

Ou de ton nez qu'aime pas l'air ambiant ... " fait-elle en me touchant le nez, avec son doigt, sans toucher mon ...

... Heu ... Je saisis pas bien là ... Je lève ma main toute bleue à ma tête pour vérifier quand même ...

... Ah ... Ok ... J'ai plus ... d'exopack ... là, va falloir me faire un topo ...

" Cette mutation ... C'était pas une putain de blague ? "

Takara explose de rire ... Avant de se ressaisir et de s'éloigner vers l'arbre ... en continuant à pouffer à intervalles régulières ...

Entre ça et le rêve zarb que j'ai fait ...

- J.35 1026 Heure Terrienne -
Je peux enfin me mettre debout, depuis hier. C'est sympa après 5 jours HS, et nourri à la petit cuillère par Takara qui, entretemps, s'est mise à s'habiller en pu... en indigène, avec des soutifs en feuilles et des colliers de gri-gris. Putain, je suis sûre qu'elle fait ça exprès pour me faire chier la vicieuse...

Mutation de merde.

Bon, toujours est-il que le plus important, c'est que je puisse me mettre debout, et ainsi pouvoir mater... hem, assister Takara en ce qui concerne ses activités. Contrairement à ce que laisserait penser la tenue qu'elle a adopté, elle a pas ouvert une maison close donnant dans l'inter-racial en pleine jungle. Non, son vrai nouveau boulot dans le village, c'est businesswoman.

C'est dingue le nombre de trucs qui peuvent se passer en 1 mois. Par exemple, notre "village", c'est un regroupement de jeunes Na'vis de plein de clans différents, y'a bien quelques anciens, mais ça reste en grande partie des jeunes.

Takara m'a expliqué que même au sein des Na'vis, y'avait des divergences, un peu comme les jeunes qui s'habillent comme à la préhistoire avec des costard-cravates et des robes moyen-ageuses sur Terre, ils sont undergrounds. Bon, j'admets que c'est un peu plus compliqué que ça dans les faits... En réalité, ils ont quittés leurs clans pour se réunir et rentrer en contact avec les humains survivants. Ils pensent que leurs vieux sont trop "old-school" et "ringue" ... Et c'est eux-même qui le disent hein ! Ils disent aussi que les humains peuvent pas être si méchants, que y'en a même certains qui en ont rencontrés des sympas...

Bah ils avaient pas tort dans un sens, sauf que "des", c'était surtout Takara...

Enfin bref, moi qui pensais me retrouver dans un trip écolo à la con, ben je m'enfonçais le doigt dans l'oeil jusqu'au bout de la natte. Quand je disais que le boulot de Takara, c'était businesswoman, ben c'est réel. Grâce à elle et ses contacts un peu partout parmi les contrebandiers, enfin les "commerçants" de la planète, elle aide depuis leur installation les bleus... Na'vis à rentrer en contact avec les humains. Elle trouve que les liens entre les humains et nous ... Merde, pourquoi je dis ça moi ? ... Enfin bref, elle veut que les bleus et les bourrins vivent dans la paix et la fraternité, avec les petits z'ozios Cui-Cui, les p'tits loups-machintrucs Wouf-Wouf, les chevaux géants Clop-Clop et les grosses saloperies carnivores de 15 mètres de long Grrr-Grrr...

De leur coté, les Na'vis trouvent ça cool de vivre dans une ambiance de beuverie étudiante en permanence, attention, je dis pas qu'ils sont pas organisés hein ! Ils ont même un service de sécurité "à l'humaine" : Des types que Takara à fourni en matériels et munitions. En gros, des cow-boys bleus de 3 mètres de haut qui sont, on va dire, un peu moins défoncés que la plupart des autres.

Le Village en lui-même, c'est un délire à ciel ouvert. Quand je trouvais l'Enfer débridée, j'aurais dû penser que la mentalité pouvait être encore plus zarb à d'autres endroits : Ici, on a des humains et des Na'vis, et le pire, c'est qu'ils arrivent à cohabiter à peu près dans la paix. A peu près, parce que comme partout, y'a des bastons à la sortie des bars... Et ici, y'a un bar, dans le "Kelutral" : deux unités de labos mobile bricolées en taverne pour les humains et à l'extérieur, une carcasse d'hélicoptère transformée en buvette et autour, des tables où les bleus se bourrent la gueule et fument je-sais-pas quelle merde. Plus loin, à l'écart, on a l'"espace inter-racial" où les Humains jouent au Poker avec des Na'vis, voire aux fléchettes ou à la roulette russe pour les plus courageux ... Ou les plus défoncés. Cette "taverne" recouvre la moitié du rez-de-chaussée. L'autre moitié, c'est un Marché/Entrepôt. Les deux sont facilement différenciables : La Taverne est un bâtiment, dans le Kelutral. C'est très con "Mais ça fait Humain". En gros, des murs en matériaux de récupération et des spots qui servaient auparavant de phares à des hélico, pour eux, c'est "Humain". Le marché par contre, concilie mieux les deux cultures : On y trouve de tout. Des rations humaines, des légumes et de la viande locales, des "objets d'arts", des outils, des bouquins, des vêtements Na'vis comme Humains, de l'électronique, des flingues bricolés "pour Na'vi", des armes blanches et des arcs bricolés "Pour Humains", des munitions, des animaux de compagnies, de la drogue, de l'alcool local, des robots " Made In Pandora " ( Oui, ça étonne, mais y'a certains Na'vis qui savent se servir d'un clavier, et d'autres qui savent bricoler avec de l'unobtanium et de la feraille de récupération. ) certes basiques, mais toujours marrants. Des dizaines de stands s'étendant à l'intérieur du Kelutral et même à l'extérieur, de pleins de natures différentes : Certaines bien décorées, d'autres en feraille ou bien recouvertes de peaux de bêtes ou de feuilles, certains même avec un logo inventé à la va-vite et tagué sur un panneau devant l'échoppe.

Au-dessus de tout ce monde, y'a les "Quartiers résidentiels", enfin ceux pour Na'vis, avec des lits faits sur place, toujours pour "Faire humain", ou des hamacs végétals zarbs. Les Quartiers Humains sont situés un peu partout là où y'a la place de faire un bâtiment isolé et muni d'un purificateur d'air, soit principalement sur les étages supérieurs et sur des espèces de terrasses à l'extérieur de l'Arbre, originellement prévu pour le décollage des banshees y paraitrait.

En bas donc, on a une vrai petite ville, et en Haut, on a un bureau qui dispose d'une vue plongeante sur les quartiers. C'est le bureau de Takara, Mlle Monopoly. Elle a quasiment tout crée ... Enfin, sans elle, le Kelutral serait toujours le refuge d'une bande de Na'vis idéalistes, mais coup de pot, la plupart de ces gars étaient des amis d'enfance de Takara... Ceux de la photo que j'ai vu dans sa chambre entre autres. C'est depuis ce bureau qu'elle gère son business, c'est aussi elle qu'a eu l'initiative de faire passer l'unobtanium au rang de monnaie. Bref, c'est elle qui fait tourner le commerce sur cette partie de Pandora. En plus de ça, elle se permet aussi de faire le Parrain du coin, comme dans ce vieux film où y'avait des italiens qui découpaient des têtes de chevals quand on refusait leurs "offres qu'on ne peut pas refuser" ... Des gens viennent la voir, elle arrange leurs soucis, ils deviennent débiteurs. C'est comme ça que c'est monté le bled.

Enfin bref, je suis toujours au milieu de fou, mais maintenant, y'a aussi des fous bleus et en plus, y'a Takara qui me nargue et que je peux même plus me taper. Je rentre même plus dans son pieu 'toutes façons...

Mutation de merde.

- J.40 1322 Heure Terrienne -
Aujourd'hui est un jour spécial !

Non, en fait c'est une journée comme une autre sur un caillou luxuriant situé très très très loin de la Terre, mais aujourd'hui, y'a Takara qui m'a convoqué dans son bureau.

Je suit Änsìt, ou " Johnny ", c'est selon. c'est un des gardes avec qui j'ai sympathisé au cours des derniers jours... Enfin, sympathiser est un bien grand mot, disons juste qu'il me doit 200 "unités" d'Unobtanium après une partie de poker qu'il a perdu. Ca crée des liens...

On arrive devant le sas du bureau, une unité mobile de laboratoire dont Dieu seul sait comment elle a été acheminée là...

" - Bon, c'est ici que je te laisse, tu connais le reste du chemin. " me dit Änsìt en m'ouvrant la porte du sas
" - En fait, je connais TOUT le chemin, y'avait pas besoin de m'escorter comme un détenu pour frimer avec ta pétoire auprès des gonzesses.
- Va te faire foutre skxawng...
- Baka !
- J'vous entends hein, donc Änsìt, tu la fermes et Turok, arrête d'utiliser ce mot, tu ne sais même pas ce que ça veut dire, et c'est pas parce qu'il t'insulte en Na'vi que tu dois lui répondre dans une langue que tu ne connais pas toi-même... "

Cette voix là venait de l'interphone dans le sas. Merci Takara, maintenant l'autre boulet est mort de rire.

Cela dit, elle avait raison, mais elle avait qu'à pas jurer dans sa langue natale ...

J'entre dans le sas, décontamination, et me voilà rentré dans le bureau de Mlle monopoly... Un simple labo mobile décoré comme sa chambre à l'Enfer, avec du matériel similaire. Franchement, on a pas la même idée de l'esthétisme...

Et puis ça fait chier, je suis obligé de me pencher parce que ma tête touche le plafond...

" - Salut gaijin' ! " me lance Takara depuis l'arrière de son bureau où elle occupée à manipuler un couteau bizarre dans sa main gauche. Ça a l'air technique comme truc ...

" - T'as pas de répliques cinglantes ? T'as laissé ton mythique sens de la répartie au placard ?
- Heu... Ta gueule ? "

Bruit de frôlement caractéristique ...Une mèche de cheveux vient de me passer sous le nez ... Sérieux, elle est pas sociable cette fille ...

" - Tu penses un peu à mon intégrité physique ?... T'es dingue ?!?
- Non, juste agile de mes mains ... bon, tu viens t'asseoir ? D'ailleurs, je préfère prévenir ton intégrité physique : J'en ai tout un stock." dit-elle avec un sourire de gamine en ressortant un autre de ces couteaux de sous le bureau.

Je m'assois, enfin je tente. Cette putain de chaise est faite pour un humain, pas pour un bleu... J'ai pas l'air con... Takara me regarde d'un air perplexe en manipulant son couteau sans même sembler s'en rendre compte.

" - Désolée, c'est vrai que t'es le seul Na'vi que je puisse recevoir dans mon bureau, les autres supportent pas l'air terrestre...
- Arrête de me traiter comme si j'étais l'un des leurs !
- On ne va pas revenir dessus, c'est comme ça, et tu ne peux rien y changer ... En plus, je suis sûre que tu va t'y faire... Par exemple, quand t'aura fini de t'émerveiller sur le balisong - Un magnifique Benchmade model 42 soit-dit en passant, une antiquité quasiment introuvable -, ta vue va retourner se fixer sur ma poitrine..."

Putain d'allumeuse de merde... Je suis sûr qu'elle nymphomane ou sadique, sûrement les deux...

Bon, par contre faut avouer qu'on a une sacré vue d'ici. Elle a troqué ses peaux de bêtes pour son sacrosaint pantalon de treillis... Par contre, en haut, elle n'a que son blouson de cuir qu'elle n'a même pas pris la peine de fermer, même pas de soutif'...

Oh, et puis merde, elle avait qu'à pas me donner l'idée de mater !

Une autre mèche me passe devant les yeux... Elle aurait fait fureur comme coiffeuse...

" - Ce n'était PAS une suggestion, tu es donc prié d'arrêter de te rincer l'œil.
- T'avait qu'à t'habiller. "

Comme seule réponse, elle enlève son blouson ... Je détourne instinctivement le regard, y'a des limites quand même...

" - Bon, maintenant que ça c'est réglé, on peut parler sérieusement ?
- C'est toi qui voit, mais si tu pouvais remettre ton blouson ça m'arrangerais...
- Ton coté pervers a disparu ?
- Rien à voir, 'pas envie d'attraper un torticolis, et encore moi de me retrouver avec un machin modèle 42 entre les jambes ... "

J'imagine le truc d'ici : " La glorieuse épopée de Turok le mutant, qui se retrouva castrée par une japonaise hystérique à l'aide d'un couteau antique."

" - Boarf, tu peux regarder, c'est pas comme si ça me gênait réellement ...
- Sans façon.
- Comme tu voudras. Pour en revenir à la raison de ta venue, j'ai un ami qui a un souci.
- Laisse-moi deviner, un type à convaincre, le coup de l'"Offre qu'on ne peux pas refuser" ?
- Je sais pas d'où tu tiens ces idées " fait-elle d'un air étonné, enfin je présume puisque je ne peux pas voir...
" - En plus je suis japonaise, pas sicilienne ... Bon, toujours est-il que cet ami a des problèmes dans le nord. Vois-tu, il n'y a pas que l'Enfer qui ait survécu, il y avait d'autre grandes bases, d'autres plus modestes. Bref, la base de cet ami a des problèmes avec les tribus Na'vi du coin, et c'est précisément pourquoi je t'envoies...
- T'as pas moyen d'envoyer des troupes, avec de quoi les massacrer ?
- J'aimerais bien éviter. Et quand bien même, non, je n'en ai pas les moyens...
- Tu me déçois là ...
- Toi aussi." répond-t-elle ironiquement

" - Ça n'a rien à voir !
- C'est ça... Petite nature.
- Je regarde si je veux, c'est juste que ... heu ...
- Je te crois. Bon, tu part demain avec Le Hibou, Artyom et Roxane.
- Les ...
- Attends."

J'entends un clic, elle vient d'appuyer sur un dispositif situé sur son bureau

" - Dom', tu dégages ton cul de devant la fenêtre ou je raconte à ta copine que tu passes plus de temps à mater ton employeuse qu'à garder sa porte... "

Rires à l'extérieur, suivis d'ordres, probablement du dénommé Dom' à ses collègues.

" - Tu disais donc ?
- J'sais plus ...
- Tant mieux, tu peux disposer."

Je me retourne vers la porte, surtout ne pas se retourner ...

" - Et sort-moi le balai que t'as le cul, t'as franchement l'air con à vouloir faire le type vertueux alors que t'es plié en deux à cause de plafond ... "

Gnagnagna... Allumeuse...

Je passe dans le sas sans même lui avoir répondu et rencontre Änsìt à la sortie.

" - Alors la boss, elle est comment ?
- T'as pas plus con comme question ? "


- J.41 1523 Heure Terrienne -
La matinée a été relativement cool, on a déjeuné tranquillou avec Miguel, mon coloc, il avait acheté du vrai café la veille, du vrai, 100% pur Arabica ... Enfin, c'est ce que dit la boite, moi je sais même pas ce que c'est de l'Arabica. On s'est séparé avec un peu d'émotion, faut dire qu'en une semaine on était devenu potes, un peu. Il tient une quincaillerie dans le marché, une qui marche plutôt bien, ce qui explique la bonne bouffe qu'il ramène. Il aime la bonne bouffe Miguel. Il en a profité pour m'offrir un collier porte-bonheur. Il est sympa Miguel, un peu con des fois, mais sympa.

Après tout, je suis près à croire en sa capacité de porte-bonheur après ce qu'il m'est arrivé, j'suis plus à ça près.

Maintenant, je me dirige vers l'entrée Nord du Kelutral, en traversant le marché. Un endroit sympa ce marché, plein d'activité, ça gueule, ça fait sa promo, ça demande si il est frais son "Yérik". Je sais pas ce que c'est un Yérik, et à vrai dire j'en ai rien à foutre. Je passe devant une armurerie, un gamin Na'vi avec une blouse de mécano et des lunettes de soudure tente de me refourguer une AVR-30, je décline l'offre poliment. Etonnant qu'un gosse vende des armes, mais bon, faut bien gagner sa vie.

Plus loin, près de la sortie, une bande de gosses malpropres et en haillons s'enfuit avec de la bouffe, probablement volée sur un étal. Ils sont poursuivis par un homme portant un tablieret une hachette ensanglantée, sûrement le propriétaire du-dit Etal. La scène est marrante.

Je sors enfin du Kelutral, on m'appelle. Je tourne la tête, il y a un grand Na'vi ( Comment ça euphémisme ? Il fait une demi-tête de plus que moi ! ) en treillis avec protections de combat complète, gants, gilet pare-balle, genouillères, coudières, mitaines anti-coupures, lunettes et casque de combat ( Et le tout à sa taille, s'il vous plait ). Il a, en plus de ça, une foule d'étuis à couteaux de tout types sur lui, un harnais à grenades et un fusil , ainsi qu'un foulard motif camouflage pour compléter de cacher intégralement son visage. ( A vrai dire, y'a que sa taille qui me faisait dire qu'il était Na'vi, sinon, on ne voyait rien. ) Ce gars me fait signe. Je m'approche, pour engager la conversation, mais c'est lui qui commence.

" - Turok ?
- Heu, ouais, c'est moi.
- Cool, moi c'est Artyom ! Alors comme ça, tu nous accompagnes jusqu'à Dead Man's Pass ?
- ...
- Géant ! Dis-moi, c'est vrai que t'as buté un Palulukan avec une seule balle ?
- Heu, ouais sûrem...
- Trop bon ! C'était comment ? Ah putain, géant, GEANT !
- Heu ... ben ...
- Et dis... "

Il se tait d'un coup à la vue d'une bleu qui est sortie de l'arrière d'un Cygne reconverti en camions de marchandises et se dirige vers nous.

" - Ah ben tiens ... heu, salut Roxane ! "

Hum, là je suis en plein délire, après le commando du dimanche, y'a la gothique bleu ... Une superbe robe noire à frou-frou tombant presque jusqu'au sol façon d'avant les années 2000, peut-être même encore avant... Du genre du temps où on faisait encore les comptes de fées, une coiffure noire cascadant jusqu'au bas du cou avec des rubans et des clochettes, la natte-prise universelle enroulée à l'arrière de sa tête, un maquillage noir et d'improbables rangers assorties à la tenue.

" - Salut beau gosse ... Salut Artyom ... "

Y'a une putain de couille dans le pâté là ... On a dû oublier de me prévenir ...

" - Bon, excusez-moi de mon ignorance mais ... C'est quoi ce délire ?
- Qu ... quel délire ? ... J'veux dire, j'comprends pas, y'a un truc qui cloche ? ... "

Ouais, bon, j'suis tombé sur la flèche de l'Ouest...

" - Ben, c'est quoi ces fringues, et surtout, je croyais que je devais suivre des Humains..."

Cette fois, c'est la gothique qui prends la parole

" - Ben non, figures-toi que t'es pas le seul d'entre-nous à chercher de l'action, beau gosse !
- Arrête de m'appeler comme ça ! "

Elle me regarde avec une attitude d'ado rebelle, j'vous jure ...

" - Et si je refuses ?
- Bon, écoutes, c'est pas parce que t'es frustrée du cul que tu dois reporter ton attention sur moi, drague plutôt l'autre. "

Prends ça ... Crois pas que j'en ai pas vu d'autres ...

Ah merde, quand on parle de la louve... Takara se ramène vers notre groupe, son manteau fermé ( Point à noter ... ), un fusil à la main et un sac de matériel sur le dos.

" - Salut les gars ! Tiens Turok, c'est pour toi, au cas où. C'est cadeau, pas la peine de me remercier, ça me fait plaisir.
- Si tu le dis.
- De rien ... Bon, Artyom, où est le Barbu ?
- Heu ... ben ... il est parti régler quelque trucs mais je pense qu'il va pas tarder, m'zelle Ari."

Tiens, un nom qui ressurgit des ténèbres de mes souvenirs...

Takara dans un couloir, qui égorge le garde de son bureau, un mécano, qui descends le geôlier de la prison.

Tout le monde ne doit pas être au courant de son nom en fait...

" - Bien, bien. Au fait Roxane, j'ai les ...
- Le v'là qui r'vient m'zel... "

Takara regarde le commando de service droit dans les yeux avec son air de tueuse en disant avec la voix posé qui va avec :

" - Ne m'interrompts plus jamais, me suis-je fait comprendre ?
- Ou... Oui m'dame "

Le pauvre chie dans son froc ... C'est dingue l'effet que provoque cette fille, elle est pas sortable ...

" - Je disais donc Roxane, que je t'ai trouvé deux SN-9, les voilà. D'ailleurs j'ai demandé à Midnight de te les bricoler : Le résultat devrait te plaire "

Elle sort de sa musette deux revolvers, comme celui que j'ai gagné auprès de Shogun.

Le type dans la salle, je brandis le flingue, je vide le chargeur, les faucons qui s'esclaffent, qui m'acclament.

" T'es un gentil, tu peux pas t'en empêcher ! "

Putain de flash-back.

Personne ne semble avoir remarqué que j'ai eu deux absences en 30 secondes. Il s'affairent à se refiler leurs cadeaux. deux " SN-9 " donc, avec compensateurs de recul et lunette à ce que j'ai compris. Made in Hell's Gate, ils ne sont plus fachés avec nous apparemment. Ceux-là sont peints en noir et recouverts de fines arabesques dorées avec marqué " Roxane " sur le flanc du canon de chaque arme en écriture stylisée et avec une gravure de son visage de profil sur la poignée. Classieux, très joli, mais je vois mal l'utilité. Y'en a probablement pas.

" - J'aimerais bien te dire que c'est fait à la main, mais bon, ici, on a pas d'ouvriers super-rapides, mais on a des idées ... Et de quoi convertir un laser découpeur de précision en graveur...
- Merci, c'est trop cool ! J'sais pas comment vous remercier, z'êtes trop gentille mademoiselle Ari.
- Ce n'est rien Roxane, ça me fait plaisir, je te demandes juste de t'acquitter de ta mission, de bien protéger le Barbu et Turok jusqu'à Dead Man's Pass et de revenir en un seul morceau.
- Bien, mademoiselle Ari."

Elle s'incline, un genou à terre... J'y crois pas, me protéger ! La meilleure ça ...

Elle engage ensuite la conversation avec Artyom, à propos de se taire au moment opportun, du respect, et d'autres trucs. Roxane contemple ses flingues comme un gamin devant la dernière ThrillSquare à Noël, assise en train de balancer ses jambes sur une caisse de marchandises. Je me demande si c'est toujours à la mode ces trucs sur Terre...

Le Barbu arrive, le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il porte bien son nom. C'est accesoirement un humain, chose à signaler, un solide gaillard, un peu bedonnant mais ... barbu, avec un coupe-vent, un pantalon de treillis délavé et un holster contenant un de ces revolvers dont tout le monde a l'air de raffoler à la ceinture. Apparemment, à son attitude, on peut facilement voir que ce n'est pas un combattant, il parle à Ari comme il parlerait à ... je sais pas moi, un patron ? Un type à qui on lécherais les bottes ? Le Parrain ?...

On fait les présentations, il a une voix rauque, avec un fort accent de l'Est ( De l'Est sur Terre, entendons-nous bien ), ça contraste avec la voix excitée d'Artyom et celle d'ado rebelle de Roxane. Après ça, il fait un geste, ça s'affaire, des mecs montent dans les Cygnes. Plus ou moins bien armés, plus ou moins bien équipés, certains néanmoins semblent être juste des ouvriers, et n'ont en général qu'une salopette ou une combinaison de mécano, un casque obsolète et un flingue ridicule pour les plus chanceux.

Juste avant que le convoi se mette en branle, Takara m'amène à l'écart.

" - Je sais que tu trouves les deux Na'vis ridicule, mais ils sont précieux, sinon je ne te les auraient pas affectés ... Pour ce qui est du Barbu, il est louche, j'aimerais bien que tu le surveilles et que tu me mettes au courant de ses actions à ton retour. Bon, maintenant, fais gaffe à toi et reviens-moi en un seul morceau. Je compte sur toi pour régler ce problème.
- Bueno, Don Takara.
- Bene plutôt.
- Heu, si tu... "

Elle me serre dans ses bras avant que j'ai fini ma phrase ... C'est dérangeant ... Surtout qu'en fait, elle me serre au niveau du nombril. Avant de sauter pour m'attrapper au niveau du cou, enlever son exopack et m'embrasser, en m'encerclant le ventre de ses jambes pour assurer sa prise...

Puis elle redescend en remettant son masque, et me dit en souriant :

" - Pour tout ce que j'ai pas fait.
- Heu ...
- Vas-y maintenant, baka, et tâche de rester en vie. "

J'ai pas l'air con moi maintenant, j'dois être rouge comme ... Comme un Na'vi qui rougit. Bon, on va dire que je doit être violet.

Sérieux, elle est dingue cette fille...

Je mets au moins 2 minutes à revenir à moi, planté au milieu de la place comme un con. En fait, c'est Roxane qu'est revenu me tirer jusqu'au camion, à l'arrière duquel je prends place.

Tu parles d'une journée...